Originally: Thèmes de l’Emission de la Semaine

Compte tenu des liens étroits entre la 48e et la 49e Législature, des précédents et des éléments conjoncturels, si on brandit exclusivement l?article 129.3 de la constitution, pour faire comprendre par ce biais, ce qui s?est passé en Assemblée Nationale le 14 janvier 2013, quand le premier ministre n?a pas pu présenter son bilan chahuté par le PRI, un bloc parlementaire minoritaire, on n?est vraiment pas pas en train d?expliquer, ou d?analyser ! On est au contraire en train de justifier ! Il est absolument évident que le contexte de cet acte spectaculaire n?est pas unidimensionnel. Si ce chahut, inédit dans notre culture, provoqué par le PRI, est en pratique dans d?autre culture. Vouloir en faire une norme démocratique pour désormais l?adopter, est exagéré, de mauvais goût et peut convainquant ! En outre ce chahut étant indubitablement anarchique, s?oppose au principe qui distingue le régime démocratique de tous les autres régimes, le consentement !


 


A cette première session en Assemblée Nationale, le président et le premier ministre, leaders du pouvoir Exécutif, sont en principe des invités au siège du pouvoir Législatif, d?une part. Mais d?autre part, il est évident que le premier ministre était venu dans un but bien spécifique, s?acquitter d?une obligation constitutionnelle, présenter son bilan, article 98.3 de la constitution. Ce vacarme causé par les parlementaires du PRI, a certes empêché la lecture du bilan, par le premier ministre. Mais a-t-il déraillé le processus du dépôt du document par le premier ministre ? A-t-il empêché la réception et l?acceptation du document par le pouvoir auquel appartiennent les parlementaires du PRI ? N?est-on pas obligé de conclure que tout ce vacarme n?a été que du symbolisme gestuel ? Que voulaient-ils accomplir en annonçant depuis un mois leur intention de chahuter le premier ministre ? Il est évident que cela, a éliminé automatiquement l?effet de surprise du coup de théâtre. Etait-ce pour faire de la pression, du chantage, pour forcer une négociation ou une reddition inconditionnelle ? De fait, personne n?a mordu à l?hameçon, même pas les présidents des deux chambres ! En agissant ainsi, ont-ils vraiment servi les intérêts de leurs mandants ? Ont-ils fait preuve d?intelligence ? Ou, ont-ils seulement abusé de leur pouvoir de parlementaire ? Il est à remarquer que l?article 129.3, même quand il octroie le droit de questionner et d?interpeller les membres du gouvernement, aux parlementaires, il n?encourage en aucun cas, ni le harcèlement, ni la vassalisation, comme on en a été témoin avec la 48e Législature, d?une part. Mais d?autre part, il ne faut jamais perdre de vue qu?avec la 48e Législature, c?était Préval qui ciblait et la 48e infligeait le coup de grâce.


 


Pour comprendre l?envergure de cet acte spectaculaire et ce qui le sous-tend, il faut prendre en compte les réflexions et commentaires exprimés publiquement par différents parlementaires impliqués dans cette affaire qui mettent en exergue leurs vraies intentions, permettant ainsi de déceler les vrais éléments qui les ont motivés :


 


Le président du groupe de parlementaire Sadrac Dieudonné, s’est montré satisfait de la réussite du mouvement. « Nous avons démontré à la communauté nationale et internationale qu’en Haïti, il existe des citoyens qui n’entendent pas cautionner les agissements du gouvernement dont il a réclamé la démission. »


 


Pour ce qui est du carton jaune infligé au président Michel Martelly, qui a pu cependant présenter son exposé, l’élu des Gonaïves affirme qu`il s’agit d`un avertissement, appelant le chef de l`Etat à revoir sa copie.


 


Pour sa part, le président de la commission justice et sécurité du Sénat, Pierre Francky Exius a dit espérer que le président Martelly et le premier ministre Laurent Lamothe saisiront la portée du geste des députées de l’opposition.


 


Le premier ministre devrait, a-t-il dit, présenter sa démission en raison de « son incapacité à rassembler une majorité au niveau des deux branches du parlement pour mener à bien la politique du gouvernement ».


 


« Quant à Michel Martelly, il doit comprendre que l`entraîneur de son équipe gouvernementale n’a pas donné les résultats escomptés et pour cela, il devrait le limoger », a dit M. Exius, faisant savoir, que si Michel Martelly a été assez intelligent de présenter le bilan à la place du premier ministre, son geste prouve cependant la nécessité de le remplacer, a-t-il ajouté !


 


Après l?incident à la première session annuelle du parlement en Assemblée Nationale, compte tenu de l?ensemble des réflexions et commentaires exprimés publiquement par ces parlementaires, ayant encore fraîchement à l?esprit les précédents de la 48e Législature, on est bien obligé de se poser la question de quoi vraiment il s?agit ?  On a été récemment témoin d?une campagne de déni de légitimité par ces mêmes parlementaires contre l?Exécutif pendant un an, qui a été incontestablement un désastre. Cependant, n?est-il pas logique dans ce contexte de se poser de manière réaliste la question, le bras de fer, a-t-il vraiment nourri son homme ? Quand on lit les remarques ci-dessus mentionnées faites par des parlementaires impliqués dans ce mouvement, et qu?on se rappelle l?arrangement qui a existé subrepticement entre Préval et des parlementaires de la 48e Législative, et tenant compte aussi du sit-in récent de ce groupe minoritaire de parlementaires à la primature, réclamant leur part des sommes allouées aux Collectivités territoriales, les choses prennent automatiquement une nouvelle allure. On est forcé de prendre une lecture différente, devant aller au-delà de ce qui est simplement apparent. Et on se rend compte que les prérogatives qu?octroie l?article 129.3 aux parlementaires, ne peut pas être l?unique motif justifiant le comportement des parlementaires du PRI. Car l?acte spectaculaire qu?ils ont annoncé pendant un mois et posé le 14 janvier à la cérémonie annuelle d?ouverture en Assemblée Nationale, ne peut pas être une fin en soi. S?il ne l?est pas, il est moyen. Un moyen pour accomplir quoi ?


 


Ce n?est un secret pour personne que la 48e Législature, ait été la plus corrompue des annales de la République. Or la quasi-totalité de la 48e, a été réélue aux dernières législatives. Pendant 5 ans, Préval à limogé à loisir, avec la complicité de certains parlementaires de la 48e législature, des ministres et des premiers ministres, pour s?assurer simultanément de l?omnipotence de son pouvoir et du succès de la gestion de sa stratégie de la continuité. Est-ce que ce n?est pas ce que Pierre Francky Exius suggère à Martelly au sujet de Lamothe, s?il était assez intelligent ?


 


Fort de cet arrangement avec Préval, l?article 129.3 n?était-il pas devenu l?épée de Damoclès avec quoi certains parlementaires de la 48e Législature extorquaient les ministères ? Quand on lit les réflexions de ce groupe minoritaire, on est obligé de se poser la question, est-ce que certains membres de la 49e Législature veulent maintenant, avec Martelly, reprendre l?arrangement que la 48e avait avec Préval ? Retenez bien ce que dit le député de PRI de Dame-Marie, Acklush Louis-Jeune : «Ça n?a rien à voir avec les dix millions de gourdes. D?ailleurs, ces fonds ont déjà été décaissés pour la construction d?un tronçon de route dans ma circonscription. » S?ils savent pertinemment et en détail, ce pourquoi les fonds ont été déjà décaissés par la primature. Quel était donc le but de ces convocations ? Se cherchent-ils un nouveau bouc sacrificiel pour que l?article 129.3 de la constitution puisse se transformer à nouveau pour la 49e Législature, en épée de Damoclès, pour extorquer les ministères ?


 


Va-t-on revivre ce qu?on a vécu sous Préval avec la 48e Législature ? Allons-nous à nouveau assister au spectacle crapuleux des antichambres dans les couloirs des ministères ? Va-t-on avoir à nouveau cette longue liste de sinécures au ministère de l?intérieur etc. La 49e Législature va-t-elle reprendre la série de man?uvre de harcèlement et de vassalisation par le biais des convocations et interpellations des ministres et des premiers ministres ? Toutes ces convocations et interpellations de la 48e Législature, ont abouti à quoi, servi à quoi et servi les intérêts de qui ?


 


C?est précisément ce qui a provoqué l?ankylose totale du gouvernement de Préval et contribué à la dilapidation sans précédent des fonds publics ! Si Préval obsédé que par la gestion de sa stratégie de la continuité, n?était pas concerné. Martelly est-il dans le même état d?esprit ? Vue les précédents qu?on a vécu avec la 48e Législature, Martelly va-t-il se laisser prendre à ce piège saugrenu ? L?opposition a-t-elle intérêt dans la paralysie de l?Etat, provoquée par la volonté de certains caractériels portant mal la cocarde parlementaire ?