Originally: Adresse à la Nation
ADRESSE À LA NATION
22 septembre 2012
La Coordination Nationale de l’Organisation du Peuple en Lutte (OPL) réunie en session trimestrielle ordinaire, ce 22 septembre 2012, déplore la situation lamentable du pays, ainsi que les perspectives d’avenir funeste découlant de l’attitude antidémocratique et des décisions autocratiques des autorités en place qui engagent la société haïtienne tout entière dans les voies dangereuses de l’illégitimité et de l’instabilité politique chronique.
L’habitude dangereuse de contourner la Constitution et les lois ou de les violer carrément au vu et au su de tous, le spectacle déconcertant d’un Parlement vénal et mercantile, la tendance du président à se revêtir aussi vite des dépouilles d’un régime qu’il préconisait de changer et à s’installer avec son équipe, ses alliés anciens et nouveaux, dans la corruption ambiante, ajoutée à son penchant d’utiliser la manière forte pour contrer les conflits et les crises, laissent bien évidemment augurer des lendemains sinistres en Haïti.
Peuple haïtien qui habitez les 14 000 habitations, les 570 sections communales, les 140 communes, les 10 départements et vous, membres importants de la diaspora, revivons ensemble la succession de ces événements qui alimentent nos doutes par rapport au futur :
– une flopée d’élus issus d’élections préprogrammées, les plus rocambolesques de l’histoire de ces trente dernières années, sous l’arbitrage scandaleux de juges électoraux vénaux ;
– un président élu, jouant au naïf mais fort pourtant d’une expérience politique tour à tour putschiste et opportuniste ;
– le non-respect du principe de la majorité parlementaire dans le choix d’un Premier ministre ;
– la mise à genou du Parlement par la corruption pour le porter à accepter les choix autocratiques du président ;
– la violation flagrante des prescrits constitutionnels relatifs au calendrier électoral, ce qui constitue un crime de lèse-souveraineté populaire et un artifice visant à fragiliser la société en général et les partis politiques en particulier, rendant ainsi le système politique dysfonctionnel ;
– le contrôle présidentiel direct sur les douanes, les ports et aéroports, au mépris de l’autorité ministérielle ;
– la perception illégale de taxes en Haïti et à l’étranger par des compagnies auparavant liées au candidat Martelly et à ses associés politiques et /ou économiques ;
– la restauration sournoise, illégale et irréfléchie des anciennes Forces armées avec campement, armes et minutions et sans un commandement affiché mettant ainsi en danger ces militaires démobilisés eux-mêmes, la PNH et toute la population ;
– l’arrestation arbitraire d’élus et d’autres citoyens ;
– la réapparition de l’accusation de crime contre la sûreté intérieure de l’État si courante sous la dictature des Duvalier et les régimes autoritaires qui se sont succédé ;
– la double falsification des amendements constitutionnels frauduleux qui redonnent droit de cité aux lois scélérates antérieures ;
– les nominations abusives dans l’administration publique en général et dans le système judiciaire en particulier débouchant sur le scandale du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) ;
– le processus très avancé de mise en place d’un Conseil Électoral Présidentiel Contesté d’Avance (CEPCA), selon le modèle antidémocratique et antipatriotique mis en place par les chefs d’État antérieurs ;
– les chocs répétés avec la Presse ;
– le mépris affiché à l’égard des partis politiques et des organisations de la société civile ;
– la subordination des autres pouvoirs et la vassalisation de l’appareil administratif de l’État manifestées par le port du bracelet et de la chemise roses, signes d’allégeance, de soumission totale et d’obéissance aveugle au Chef ;
– les querelles incessantes internes pour le partage des prébendes ;
– le saccage quotidien des ressources minières nationales en complicité avec des compagnies étrangères, à l’insu du Parlement, sans publication d’accord officiel et, surtout, sans participation des communautés locales ;
– les plans arrêtés de pillage des gisements d’or et de cuivre récemment mis à la connaissance du grand public ;
– l’annonce publique de mise en place d’une dynastie héréditaire comme au temps des Duvalier père et fils ;
– le débauchage abusif, moyennant offres indécentes et menaces à peine voilées, de parlementaires de tous bords pour la formation forcée d’une prétendue majorité présidentielle à la Préval’
– la hausse vertigineuse des prix des produits de première nécessité, particulièrement des vivres alimentaires.
Ces actes répréhensibles perpétrés au grand jour font de leurs auteurs, pris collectivement, l’ennemi public numéro 1 du peuple haïtien. Une telle forfaiture les conduira irrémédiablement devant les instances de justice concernées, incluant la Haute Cour de Justice, quand la Nation demandera des comptes.
Face à ce pénible constat, l’OPL demande à ses militants, à ses cadres, ses élus et à tous ses dirigeants de resserrer les rangs autour du drapeau haïtien et de notre emblème rassembleur : le tambour tenu élevé par des mains de femmes et d’hommes solidaires, unis pour la reconquête de notre dignité si souvent flétrie par ceux-là et celles-là mêmes qui auraient dû la défendre au lieu de s’agenouiller devant des occupants étrangers.
L’OPL se positionne comme le PARTI DU PEUPLE HAÏTIEN. Elle s’attelle donc à la difficile bataille pour le recouvrement de la souveraineté du peuple haïtien sur son territoire, qui passe par la Refondation de l’État-Nation, la reprise du contrôle de la fiscalité aux mains des contrebandiers et des narcotrafiquants, la lutte contre la corruption et la mise en place d’une administration saine, la définition et la constitution des forces de répression légales et constitutionnelles et, notamment, par la conclusion d’un pacte intergénérationnel entre tous les secteurs de la Nation, garantissant la formulation, l’acceptation et la mise en ‘uvre d’un plan stratégique de sauvetage national.
Les prochaines joutes électorales mettront aux prises ceux qui sont pour le maintien des troupes étrangères en Haïti, afin de consolider leurs privilèges politiques, économiques et sociaux, et ceux qui exigent l’établissement d’un calendrier de départ des troupes onusiennes, ainsi que la mise en place et le renforcement des institutions étatiques, impliquant la signature d’un pacte d’inclusion, de progrès et de prospérité partagés, facilitant la Refondation de l’État-Nation. Ayant opté pour une Haïti libre, moderne, prospère et solidaire, l’OPL choisit son camp : celui de la Nouvelle Haïti devant émerger des ruines du tremblement de terre dévastateur du 12 janvier 2010.
L’OPL en appelle aux forces vives de la Nation, aux travailleurs/travailleuses et aux paysans/paysannes qui n’ont jamais baissé les bras ni abandonné leurs outils ni leurs convictions patriotiques, aux jeunes des classes secondaires, aux étudiants/étudiantes, aux universitaires qui se réclament du siècle des Lumières et qui s’attachent à l’évolution de la pensée, de la science et du progrès, aux professionnel(le)s, aux femmes et aux hommes respectueux des valeurs pérennes, aux responsables et membres des organisations populaires qui ne se sont jamais vendus aux pouvoirs déviants, aux directeurs d’opinion, aux journalistes, aux bergers/bergères du troupeau de toutes les églises, aux enseignants, aux commerçants et commerçantes de gros ou de détail aux madan sara de tous les jours, à la marée de chômeurs et de chômeuses, aux entrepreneur(e)s qui aspirent encore à une production nationale viable. Réunissez-vous, chers compatriotes, pour le redressement difficile mais inévitable de notre Haïti meurtrie.
Port-au-Prince, le 22 septembre 2012
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Maurissaint Jean Irvelt CHÉRY Éloune DORÉUS
Secrétaire exécutif Porte-parole
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Riché ANDRIS
Coordonnateur général adjoint
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Sauveur Pierre ÉTIENNE
Coordonnateur général