Originally: Theme de l’Emission de la Semaine
A l?avant-scène politique, mais pas au même niveau d?intensité, se trouvent aujourd?hui deux éléments de discorde importants, la crise postélectorale des législatives et l?adoption des amendements constitutionnels par la 49e législature. La crise postélectorale vue son intensité, affectant à la fois, la composition du parlement, 17 circonscriptions et un poste sénatorial au département du Centre, supplante tous ce qui, avec elle, partagent l?avant-scène politique. De faite elle a provoqué des pertes de vies et de biens, dans plusieurs Départements : l?Artibonite, le Centre, la Grande Anse, le Nord-est, le Nord-ouest, le Nippes, l?Ouest et le Sud.
La Mission d?Observation Electorale Conjointe OEA ?CARICOM (MOEC), suite aux décisions prises par le Bureau du Contentieux Electoral National (BCEN) de renverser les résultats préliminaires, recommande le retour aux résultats préliminaires. Gaillot Dorsinvil président du CEP propose de son coté de négocier la recommandation de la MOEC. Alors qu?une solution technique immédiate, basée sur le constat et l?interprétation des faits, est recommandée par la MOEC. Gaillot Dorsinvil propose au contraire une solution politique prolongée, tortueuse et lassante, la négociation. Veut-il, ou a-t-il vraiment aucun intérêt dans la résolution de la crise postélectorale ? Voilà le Hic !
Voilà ce qui est mentionné textuellement dans le 5e paragraphe du rapport de la MOEC :
« Sans doute sous la pression des échéances non respectées et d?autres contraintes, il semble que les juges du BCEN ne se soient pas armés de la sérénité et de la patience nécessaire pour faire un travail rigoureux en formulant leurs décisions. Les arguments des deux parties n?y sont ni exposées ni discutées en détail. De façon générale, les décisions ne font que proclamer le gagnant sans décrire les motifs ou le raisonnement ayant conduit à cette décision. Ceci a rendu le travail du BCEN opaque aux yeux des parties impliquées et du public en général. »
Les mots ont leur sens. Dans ce rapport, ils expriment, le cas échéant, à la fois des soupçons et des constats.
-La première remarque, de quelles autres contraintes s?agit-il ? D?où viennent ces contraintes ? Quels intérêts servent-elles ?
-La deuxième questionne ostensiblement la compétence et le sens d?équité des juges du BCEN, d?une part. Et d?autre part, la qualification et les pré-requis élémentaires exigibles de quiconque se propose d?assumer la responsabilité de juger, l?intelligence, le discernement, la sérénité et la patience.
-La troisième met en exergue le fait que l?objet du conflit, les arguments des deux parties, ne sont ni exposés, ni discutés. En d?autres termes, le problème n?est pas élucidé.
-La quatrième dénonce clairement l?absence totale d?argument logique et légal soutenant et justifiant la décision à laquelle les juges du BCEN ont abouti.
-Enfin, ce qui est clairement exprimé comme conclusion dans le 5e paragraphe du rapport de la MOEC, c?est l?opacité des décisions non-articulées prises par le BCEN qui a provoqué et sous-tend jusqu’à présent la crise postélectorale des législatives. En d?autres termes c?est le caractère arbitraire de la décision imposée, non-justifié, sans argument valable pouvant convaincre les parties en question et faire valoir le bien-fondé du jugement prononcé par le BCEN.
Le fait que Gaillot Dorsinvil, président du CEP ait lui-même proposé, en tant qu?autorité électorale de haut niveau, une solution politique à la crise. Il a proposé en l?occurrence de négocier les décisions du BCEN qui sont sensées, selon l?article 191 de la loi électorale 2008, n?être susceptible d?aucun recours. Ceci met en exergue le fait que Gaillot Dorsinvil accepte à passer outre l?autorité légale des décisions du BCEN qui sont sans appel. L?article 191 se lit comme suit :
Article 191
Les décisions du Bureau du Contentieux Electoral National (BCEN) sont définitives et ne sont susceptibles d?aucun recours. Ces décisions doivent être affichées suivant la délibération du BCEN.
Comment interpréter le fait que Gaillot Dorsinvil propose, non-seule de passer outre l?autorité du BCEN, mais propose de surcroît la formation d?un autre BCEN remplaçant celui qui a pris la décision irrévocable de renverser les résultats préliminaires ? Est-il en train de sacrifier un aspect important de l?indépendance et de la souveraineté de l?institution à laquelle il appartient, au profit d?une solution politique négociée ? Confirme-t-il et corrobore-t-il du même coup la déclaration d?incompétence exprimée, à l?endroit des membres du BCEN, dans le 5e paragraphe du rapport de la MOEC ? Fait-il du dilatoire, comptant sur la courte durée traditionnelle des contestations électorales, pour que la crise se termine en queue de poisson, au profit d?INITE ?
Certes sur le plan politique, l?adoption de la recommandation de la MOEC aurait diminué l?influence d?INITE au parlement, d?une part. Mais d?autre part, augmenterait-elle pour autant celle du nouveau pouvoir au parlement ? Peut-on réellement avoir une perception de ce nouveau parlement qui soit substantiellement différente de celle de son prédécesseur ? N?a-t-on pas vu le parlement précédant imposer la formation d?un gouvernement de coalition à Préval et à Alexis en 2006 ? N?a-t-on pas vu aussi, peu de temps après, ces mêmes parlementaires faire antichambre dans les couloirs du palais national et des ministères pour se faire prostituer ? Depuis quand, la cohésion des blocs parlementaires en Haïti est-elle fondée sur l?affinité doctrinale et d?idéologique ? Les blocs parlementaires des deux dernières chambres au Sénat et à la députation, étaient formées, gérées et manipulées ouvertement par qui ? Ceux qui aujourd?hui, s?illusionnent et croient qu?il faudra à Martelly et à son entourage, un certain niveau de doigté, de finesse et de savoir-faire politique pour négocier et gérer la fragilité des relations entre le Législatif et l?Exécutif dans le cadre d?un régime semi-parlementaire, où l?Exécutif n?a qu?une présence totalement négligeable au parlement, devraient se poser la question. Depuis quand le régime présidentiel a-t-il été aboli ou remplacé en Haïti et par quoi ? Cette finesse, cette doigté et ce savoir faire, dont aura besoin le nouveau gouvernement seront supportés comme d?habitude par les trois piliers qui garantissent la survie de la caste qui domine l?échiquier politique depuis 53 ans, le népotisme, l?impunité et la corruption !
Ce dont bon nombre d?entre nous Haïtien avions rêvé, comme opportunité positive qui s?offrait tout naturellement au lendemain de cette catastrophe naturelle du 12 janvier 2010, la refondation de l?Etat haïtien et l?ensemble de tout ce que cela comporte comme exigences, pensez-vous que ce soit encore possible avec ce que les élections ont charrié à l?avant-scène politique ?