Originally: Le directoire du projet pour la Démocratie en Haïti
Originally: Thèmes de l?Emission de la semaine
Bonsoir chers auditeurs. Vous écoutez sur les ondes de Radio Classique Inter, l?émission Actualités Politiques, Grandes lignes, animée par Robert Bénodin.
Nous avons avec nous, sur les ondes de Radio Classique inter, Marie Yolène Gilles, Journaliste investigateur, membre du RNDDH, organisation spécialisée en droits humains sur l?état du pays et de la nation sous l?effet des intempéries.
Marie Yolène Gilles, nous vous souhaitons la bienvenue une fois de plus sur les ondes de Radio Classique Inter.
RB : Mis à part les désastres de l?ouragan Jeanne en 2004, dont les Gonaïves ne s?étaient pas encore remis, durant 2 étés consécutifs 2007 et 2008, Haïti a été jusqu?à date, victime de 8 ouragans. Et pendant ces deux dernières saisons cycloniques, Haïti a compté le plus grand nombre de morts parmi les pays affectés. Pour les 3 derniers ouragans, Gustav, Hanna et Ike, selon les statistiques des bureaux météorologiques américains, Haïti a eu respectivement : 62%, 98% et 92.5% des morts.
La liste des morts pour les cyclones Gustav, Hanna et Ike
— Gustav, 122 deaths:
76 in Haiti, 62%
26 in the U.S. (19 in Louisiana, 4 in Georgia, 3 in Mississippi),
12 in Jamaica,
8 in the Dominican Republic.
— Hanna, 175 deaths:
172 in Haiti, 98%
2 in Puerto Rico,
1 in the Dominican Republic.
— Ike, 80 deaths:
74 in Haiti, 92.5%
4 in Cuba,
2 in the Dominican Republic.
De quoi s?agit-il ?
MYG : Avant de répondre à la question, permettez moi d?inviter les auditeurs à se joindre à moi pour nous prosterner devant les cadavres de ceux qui ont péri au cours des tempêtes qui ont ravagé le pays. Et saluer le courage de ceux qui ont luté pour ne pas succomber à une mort qu?ils n?ont pas mérité, causée par la négligence de ceux qui nous dirigent.
En 2004, 2007, 2008 Haïti a été victime de ces saisons cycloniques. Cependant au cours de ces dernières semaines la situation est devenue plus compliquée pour Haïti, vu que nous n?avons aucune infrastructure pour nous permettre de faire face aux ouragans et aux cyclones. C?est pour cela qu?Haïti l?emporte sur les autres pays en ce qui s?agit des décomptes de morts, de blessés, de sinistrés, de disparus, d?habitats endommagés etc.
Bien que la saison cyclonique soit un phénomène naturel prévisible qui se répète chaque année au cours des même mois, nos dirigeants n?ont pris aucune mesure préventive pour nous protéger contre ces intempéries, comme les autres gouvernements le font. Nous devons malheureusement constater, qu?il n?y a jamais eu aucune réflexion, aucune tentative, aucune volonté manifeste de nos gouvernants d??uvrer dans ce sens, même de le faire croire dans le cadre traditionnel de leur démagogie. On a déjà compté plus de 362 personnes qui ont perdu leur vie inutilement. Il y a plus de 850,000 personnes qui sont des sinistrées. Il y a plus de 151,000 personnes sans abri. Sans compter ceux qui sont dans les hôpitaux, dans les cliniques pour y prendre des soins, et plus de 50 disparus que l?on ne peut pas retrouvé jusqu’à présent.
Nous pouvons dire que la population est non seulement traumatisée, elle est appauvrie. Elle a tout perdu emporté par la fureur des flots et du vent. Le pays et sa population ont visiblement reculé, régressé de plusieurs années par rapport à la situation antérieure qui était déjà très difficile et très précaire.
RB : En général, dans les zones ravagées par les ouragans peut-on différencier les effets de la dévastation par le vent, de celle par les eaux ? Entre le vent et les eaux qui causent le plus de dommages ?
MYG : Les dommages substantiels sont causés par l?un et l?autre, mais de manière différente. Le vent en détruisant les maisons, tue avec les débris qu?il emporte. L?eau ravage les champs, emporte le bétail, les personnes, les voitures les maisons, les infrastructures, tout ce qui se trouve sur son passage. Ce sont deux maux que nous ne pouvons pas comparer en terme de dégât et de destruction. Là où Haïti est située, elle est exposée annuellement à ces désastres naturels. La Direction de Protection Civile a compté plus de 10,842 maisons détruites, dont les fondations ont même disparu. Les maisons endommagées sont listées à 35,000. Et la quantité augmente parce qu?il y a des zones auxquelles on n?a pas encore accès. Dans le Département de l?Ouest, dans la zone de Casale par exemple, avant-hier il y a eu un glissement de terrain.
Il est vraiment impraticable d?avoir accès à des zones pour faire une évaluation des dégâts. Ces gens sont désespérés. Ils se sentent abandonnés, livrés à eux-mêmes et laissés pour compte. Ils ne savent pas quand quelqu?un viendra pour leur tendre la main, quand est-ce que l?on va entendre leurs gémissements. La situation est vraiment compliquée, par rapport aux voies d?accès endommagées par les rivières en crue. Les gens sont traumatisés et apeurés même par des pluies qui ne sont pas torrentielles.
On trouve des tas de gens qui volontairement offrent leurs aides. Il y a des policiers, mêmes sinistrés personnellement, qui continuent à remplir leurs taches avec zèle et dévouement. A travers les médiats on trouve des journalistes mêmes victimes qui continuent à véhiculer les informations par leurs propres moyens. Malgré tout ce dévouement, il y a des zones qui restent et demeurent inaccessibles. Il y a aussi de la part des citoyens des débats pour offrir des solutions pour sortir de cette impasse.
RB : Tous les départements ont été affectés par les intempéries. Lequel d?entre eux a été le plus affecté ? Et pourquoi ?
MYG : Peut-on vraiment comparer les dégâts dont les différents Départements ont été affecté. On a eu Fay, Gustav, Hanna, Ike, et il y en aura d?autres, bien qu?il n?y ait pas encore de prévision. La saison des cyclones n?est pas encore finie. La zone du Sud, qui est plate, les maisons ont été envahies par les inondations. Hier encore une pluie, à cause des rivières en crue, il y a 5 personnes de plus qui ont perdu leur vie.
Mais quand on considère Gonaïves, Port-de-Paix, des localités du Plateau Central, Cabaret, on peut croire que ce sont ces zones qui paraissent plus atteintes par les intempéries, par rapport au nombre de cadavres, la quantité de maisons endommagées, les ravages de l?eau dans ces zones.
Dans la zone de la plaine dans l?Ouest la Rivière Grise l?a balayé. La route d?Ona-Ville toute neuve et confortable, elle a été entièrement emportée. Donc la comparaison est difficile.
On peut dire que tous les Départements ont été touchés, avec beaucoup de dégâts matériels et humains. A travers nos réseaux qui couvrent les 10 Départements, nos téléphones ne cessent de sonner pour nous renseigner de l?état des lieux, comment on peut intervenir, comment sensibiliser des organisations pour aller au secours des zones.
Par exemple dans la zone du Sud-est, elle a été terriblement frappée. Les gens de cette zone sont livrés à eux-mêmes. Il y a des ONG qui y apportent l?aide humanitaire. Sauf que l?aide arrive difficilement à atteindre ceux qui en ont besoin parce qu?il n?y a pas de structure pour en faciliter la distribution.
Haïti un pays de la Caraïbe qui subit des cyclones chaque année, n?a pas de centre hébergement, pour loger les sinistrés provisoirement. Ça vient de la négligence de nos dirigeants qui n?ont pas pensé à avoir des structures d?accueil. Imagez-vous que dans la zone de Cabaret les gens s?apprêtaient à aller se réfugier dans une église, quand l?eau l?a emporté. Pour le moment il nous faut constater que les gens qui sont exposés aux intempéries ont besoin de secours, pour déterminer comment leur venir en secours, parce qu?ils sont exposés aux épidémies, aux maladies, à une famine dont ils sont au seuil. Par exemple les Gonaïves, ne sont pas accessibles à cause de l?état des différentes voies de pénétration. Il y a plus de 6 ponts qui sont tombés, sans compter les routes qui sont impraticables. Au niveau du RNDDH nous pouvons affirmer que la majorité des gens de cette zone ont péri de mort lente et horrible, de soif et de faim. Ce n?est pas la volonté de leur apporter du secours qui manquait. C?est la pénétration pour les atteindre qui était impossible. Il y a une dame d?une soixantaine d?année qui a péri de cette façon. Il y a un grand sportif du football qui a trépassé de cette façon. Il y a un bébé qui est mort de cette façon dans les bras de sa mère. Selon ce qui circule dans la ville des Gonaïves, il y a aussi un détenu qui est mort dans le commissariat de police. Ceux qui sont morts dans ces conditions, ont été tous prisonniers, isolés dans une maison sans accès ni à l?eau, ni à la nourriture.
RB : Les prisons et les prisonniers sont évidemment affectés par les intempéries.
Pouvez-vous nous informer de ce qui se passe dans ce secteur ?
MYG : L?administration pénitentiaire a 17 prisons opérationnelles. Il y a aussi des commissariats de police qui sont transformés en prison. Et depuis plus de 4 ans, il n?y a rien qui est fait pour remédier à ce problème. Gonaïves n?a pas de prison civile, mais un commissariat transformé en prison. Il y a aussi Petit Goâve, Aquin etc. Ceux qui sont incarcérés dans ces zones ont passé des moments réellement difficiles, à cause de la nourriture dont ils n?ont pas accès, l?eau qui a inondé les lieux où ils se trouvent, l?impossibilité de les faire sortir parce qu?ils sont enfermés entre 4 murailles. Les policiers étant eux-mêmes sinistrés, ne peuvent pas subvenir aux besoins de incarcérés.
La situation des prisons en Haïti est très très alarmante. Si au cours des cyclones l?eau n?a pas emporté une série de prisons, c?est parce que l?administration pénitentiaire avait pris des mesures. La prison de la Grande Rivière du Nord, la toiture a été consolidée. Les eaux de la Grande Rivière n?ont pas atteint la prison à cause de la pente. La prison de Miragoâne qui est un Commissariat transformé en prison, ça a été un désastre à cause de sa proximité avec la mer. Les prisonniers ont passé la nuit, le c?ur à la bouche, au cours des cyclones, ne sachant pas quand ils seraient emportés par les vagues.
Le RNDDH lance un SOS aux autorités concernées. Si elles n?augmentent pas l?espace carcérale par 4, quand au mois d?août 2009, la population carcérale sera à plus de 10,000 prisonniers, la situation sera ingérable. Actuellement, par prisonnier dans le pays il n?y a que 0.60 mètre, alors que les Nations Unies dit que l?espace par prisonnier doit être de 4.50 mètres. Pendant les cyclones, il y a 200 détenus qui sont aux Gonaïves, ils ont passé des moments très difficiles. Et ils ne relèvent pas de l?administration pénitentiaire. Ces situations sont très alarmantes. Les autorités ne peuvent pas dire qu?elles ignorent ces faits. Le RNDDH ne cesse pas de les sensibiliser. Mais ces autorités ne montrent pas qu?elles ont une volonté politique réelle pour résoudre les problèmes des incarcérés.
RB : Pour avoir un tableau plus ou moins détaillé de l?état des lieux, prenons les départements par ordre alphabétique. Commençons par l?Artibonite.
Quels ont été les effets de ces 4 ouragans sur le milieu rural, le milieu urbain, l?état des routes, l?état de la population, les interventions des autorités locales, des autorités centrales, de la communauté internationale, de la Minustah et de la PNH comme forces de l?ordre ?
MYG : Si on considère le chef lieu du Département de l?Artibonite, les Gonaïves, il est divisé actuellement en deux partis. On trouve Gatreau qui est sur une colline et le centre commercial, le bas de la ville, Raboteau, Ca Soleil etc. La ville des Gonaïves est complètement sinistrée. Ce qui est arrivé aujourd?hui est plus grave que ce qui est arrivé avec le cyclone Jeanne en 2004. Il est devenu plus difficile pour intervenir. En 2004, le troisième jour après le cyclone Jeanne, l?équipe du RNDDH était déjà aux Gonaïves. Aujourd?hui il est matériellement impossible pour y arriver, quoique nous ayons la volonté d?aller au secours des sinistrés de la population.
On ne peut pas remplacer l?état. L?aide humanitaire arrive au compte-goutte à cause des conditions qui ne facilite pas la tache. Hier la Minustah est venu avec de la nourriture, 5,000 plats pour les gens des Gonaïves. Les jours précédents, ils n?ont reçu que des bonbons, de l?eau sucrée et de l?eau potable pour leur permettre de résister. Donc il y a une population extrêmement affamée. Jusqu’à aujourd?hui on est entré de compter des cadavres et de penser des blessés aux Gonaïves. La pluie est tombée dans la zone de Marmelade. Le niveau d?eau a remonté encore aux Gonaïves. Le haut de l?Artibonite est encore sous les eaux.
Le Département de Grande Anse n?a pas été frappé de plein fouet par Hanna. Cependant, vous trouvez quelques rivières dans le Sud qui sont entrées en crue, qui ont causé des pertes de vies et de biens.
Le Département du Nippes a une multitude de rivières qui débordent leurs lits pour emporter tout vers la mer. Les routes sont défoncées. Les jardins sont détruits. Quant aux maisons, c?est le désastre.
Département du Nord, si la ville du cap n?est pas touchée, la Rivière Trompette à Plaisance et à Pilate, a emporté tout ce qui était sur son parcours.
Dans le Nord-ouest, la ville de Port-de-Paix a été frappée. Pour l?Ile de La Tortue, l?Ile à Vache, l?Ile de La Gonâve, la communication avec le reste du pays ne se fait que par bateau. Ile de La Tortue est une zone de commerce avec l?extérieur, Bahamas, Caicos, les Iles Turques, et la Floride, il n?existe plus de bateau dans la zone. On ne peut pas donner un chiffre exact. Nos moniteurs n?ont pas encore accès à la zone pour faire l?inventaire des pertes. C?est une situation qui demeure préoccupante. Nous ne savons pas encore comment le RNDDH pourra faire son apport.
Le Département du Sud-est a été plus sévèrement frappé par Gustav. Cayes Jacmel et Marigot ont été balayés. Il n?existe plus de plantation. Il y a plusieurs maisons qui ont disparues. Ces cyclones ont augmenté énormément l?appauvrissement du pays. On doit commencer à penser comment on va donner à manger à la population, comment on va l?héberger, comment on va apaiser sa soif. La majorité de nos sources sont polluées. Les bassins versant, beaucoup de canaux sont comblés. Il faut les curer pour prévenir de nouvelle inondation.
La Minustah assure le pont aérien pour transporter le matériel et l?aide. Haïti n?ayant aucune structure dans les villes de province pour permettre l?atterrissage, les livraisons d?aides sont limitées aux villes qui ont les structures adéquates.
Il y a des ONG qui font de la collecte. Il y a plusieurs églises qui sont sensibilisées sur la question. Il y a une solidarité, une unité qui sont en train de se développer envers Haïti. Le RNDDH fait ce qu?il peut pour venir en aide aux victimes de la zone de Cabaret. Il y a un effort dans le long terme qui pourra contribuer à permettre aux gens de récupérer ce qu?ils ont perdu. La famine est littéralement à nos portes.
RB : L?ambassadeur français Christian Conan réagissant au débat qui s?est fait au parlement concernant le rôle des ONG dans le développement du pays et la gestion de l?aide annoncée pour les victimes des intempéries, a fait la remarque : « Quand l?état est faible, il faut passer par les ONG. Quand on n?a pas les moyens, vouloir tout faire et tout contrôler, cela n?a pas de sens. »
Qu?en pensez-vous ?
MYG : Je crois que l?ONG ne peut pas remplacer l?Etat. Il faut que l?on reconnaisse que nous avons un Etat qui est mauvais gestionnaire. On a un Etat qui est corrompu. L?argent de l?Etat n?a jamais été géré dans la transparence. Quand l?argent de l?Etat entre dans les poches des gestionnaires, il n?y a jamais eu d?exemple tracé, là où des hauts fonctionnaires impliqués dans des actes de corruption, qui volent l?Etat, sont arrêtés.
Certes, on a un Etat faible, mais l?ONG ne peut pas remplacer la structure étatique. Il faut se battre pour renforcer l?Etat. Il faut forcer l?Etat à assumer ses responsabilités par rapport à chaque citoyen. L?ONG doit porter un appui à l?Etat. L?ONG n?a aucune responsabilité envers le citoyen. Le citoyen ne peut rien réclamer de l?ONG. Il faut épurer l?Etat de tous ces corrompus, pour arriver à un Etat responsable, beaucoup plus fort. Les Etat Unis canalisera son aide à travers les ONG américains. Est-ce que ces ONG ont une connaissance profonde de la réalité du terrain. Est-ce que l?aide apportée correspond aux besoins et à la réalité culturelle ou culinaire des récipients.
RB : Les aides des Etats-Unis, de la France et du Canada, sont-elles déjà arrivées ? Qui en gère la distribution ? Est-ce qu?elles atteignent les victimes dans un temps raisonnable ?
MYG : Quand on dit que l?Etat est mauvais gestionnaire. Réciproquement les ONG ne sont pas pour autant de bons gestionnaires. Il y a des millions qui sont dépensés à la Cité Soleil, sans aucune transparence. Personne ne peut justifier ce que déclarent les ONG comme investissement dans la Cité Soleil. Ce n?est pas visible. Il y a une réalité que la plus part des solutions proposées ou apportées sont temporaires et non définitives. Sont-il en train aussi de résoudre leur problème de chômage ?
RB : Avec, les routes défoncées, les ponts emportés par les eaux, le transport et la distribution de l?aide et des commodités deviennent impossibles.
Quelle solution a-t-on apporté à ces problèmes logistiques ?
MYG : Le gouvernement a donné une conférence hier pour trouver des palliatifs avant de venir avec des solutions définitives. Ils veulent faire des routes pour circonvenir les passages difficiles. Pour le pont de Mont Roui, ils veulent se trouver des ponts temporaires pour pouvoir traverser allant vers Saint Marc. On fera la même chose entre Mirebalais et Saint Marc. Ils ont dit qu?il y a des partenaires qui vont mettre à leur disposition des ponts métalliques. Il est clair que si ces voies sont ouvertes cela facilitera le transport et la distribution de l?aide humanitaire pour apaiser la faim et la soif des sinistrés. Les Travaux Publics et des Dominicains sont à pied d??uvre pour trouver des solutions immédiates aux problèmes de transport et de voies de pénétration.
A Miragoâne, c?est différent. A cause du lac qui a inondé les zones avoisinantes, on ne peut traverser que par canot. Pour cette zone on est en train de faire un effort pour atteindre les riverains de la zone.
RB : Les militaires de la Minustah que font-il pour offrir des solutions temporaires aux ponts emporté par les eaux, au moins pour les routes nationales ? Le gouvernement a-t-il fait une requête dans ce sens auprès de la Minustah ?
MYG : S?ils ont fait des requêtes auprès de la Minustah, ils ne les ont pas rendu publiques. L?ambassadeur dominicain a rendu publique l?aide qu?on lui avait demandé et a fait état de ce qu?il a pu délivrer. La Minustah ne s?est pas impliqué dans le domaine de l?infrastructure. C?est peut être leur ordre de route. Mais la Minustah a aidé énormément dans le transport de l?aide et d?autre aspect. Grâce à eux beaucoup de gens ont eu la vie sauve. Une trentaine d?enfants dans un orphelinat ont été évacués grâce à eux. La Minustah communiquant mieux que le gouvernement fait savoir ce qu?il fait par des conférences de presse. Par rapport à leur effectif, certains pensent qu?ils auraient pu faire mieux.
RB : La Minustah se rend-elle compte que les routes nationales défoncées et surtout les ponts, posent un problème de sécurité et de logistique ?
MYG : Je crois qu?ils n?en font pas une priorité. Parce qu?ils ont spécifié dans une conférence qu?ils ont fait 46 vols d?hélicoptère pendant 6 jours pour transporter l?aide humanitaire par ci et par là. Ils continuent à maintenir le pont aérien pour le transport de l?aide. Il est clair que l?aide n?est pas assez. Mais il y a une quantité substantielle qui est distribuée aux sinistrés qui se trouvent dans des zones éloignées qui sont dans une situation très précaire.
RB : La Minustah a toujours fait savoir qu?elle ne fait qu?accompagner le gouvernement. C?est le gouvernement qui décide. Il est clair et irréfutable que sa présence en Haïti est due à la déliquescence institutionnelle et à la faillite de l?Etat. La Minustah est là depuis juin 2004.
N?a-t-elle pas encore compris qu?un gouvernement en faillite est incapable de prendre des décisions ?
MYG : Certainement avec le mandat de la Minustah qui arrive à terme, on peut changer des points dans leurs objectifs et leur mission. La Minustah est là pour accompagner, former, aider à professionnaliser la police, ont-ils atteint leur but ? Ils sont impliqués dans des attaques contre des policiers, dans des viols, des vols etc. Cent onze Sri Lankais impliqués dans l?abus sexuel et violation de droits humains, ont dû laisser le pays. Ronald Denis et Benson Bien Aimé deux policiers ont été gravement battus au point où, ils ont dû être hospitalisés. C?est au gouvernement de dire ce qu?il veut.
RB : Ça fait 28 mois que ce gouvernement est au pouvoir. En réaction à la catastrophe qui a eu lieu aux Gonaïves en 2004, il y a-t-il vraiment un plan de réaménagement du territoire ? Si oui, a-t-on commencé à le mettre en application ?
MYG : C?est clair que non ! Il n?y a aucune structure d?hébergement temporaire pour abriter même 50 personnes. Voir pour des milliers de personnes qui sont sans abri aujourd?hui. Nous avons un Etat irresponsable. Il n?y a aucun plan de réaménagement du territoire, ni de reboisement. Les questions d?agriculture et d?environnement n?intéressent pas nos dirigeants. Il n?y a aucune politique environnementale. Dans ce pays le gaz qu?on aurait dû utiliser pour faire à manger est beaucoup trop cher. C?est l?Etat qui encourage le déboisement pour faire du charbon. On a un Etat pompier. On a un Etat que chaque fois que le pays est frappé par une catastrophe, il présente sa sébile aux organisations internationales pour mendier l?aumône. Ils attendent les miettes qu?on leur jettera. Ceux sont des pratiques à dénoncer. Il n?y a pas de plan d?urgence dans un pays situé dans le bassin des Caraïbes. C?est pour cela qu?Haïti l?emporte toujours pour le décompte des morts durant la période cyclonique.
RB : Il y a-t-il un plan de renforcement des structures existantes en matière de prévention et de gestion des crises et désastres ?
MYG : Il y a le Bureau de la Protection Civile qui est une direction du ministère de l?Intérieur. Nous saluons le courage de cette équipe pour leur volonté, leur détermination et leur dévouement dans le cadre dissémination de l?information sur les situations qui se développent durant ces périodes. Cette équipe a priorisé les besoins de la population au-dessus des leurs. Malheureusement, il n?y a pas eu de mesure de prévention. Ils préfèrent gérer l?urgence. Cela ne dépend pas d?eux. Ils dépendent eux-mêmes de l?Etat central. Nous devons les féliciter pour leurs efforts. Bien qu?il n?y a rien de concret, rien de tangible, rien de palpable, qui soit réalisé.
RB : A-t-on pris toutes les dispositions pour que l?aide internationale ne soit ni détournée ni mal distribuée ?
MYG : Ça c?est l?une des recommandations du RNDDH. Nous aimerions voir une gestion sérieuse de l?aide internationale pour qu?elle ne soit pas dilapidée et mal distribuée. Nous sommes en train de surveiller. Et nous encourageons d?autres organisations à venir participer pour assurer la gestion et la distribution équitable de l?aide. Il y a des parlementaires qui critique la façon de faire des ONG qui s?accaparent de toutes les activités et qui jettent les autorités haïtiennes au rancart. Il y a ce proverbe « Chat échaudé a peur de l?eau froide. » Je crois que l?implication des structures organisée aurait dû donner un résultat. Parce qu?il faut impliquer les gens dans la recherche de solutions pour leur propre communauté.
RB : A la lumière et au lendemain des émeutes de la faim, du constat de la carence de production nationale, de l?effondrement de l?économie, de l?augmentation du taux de chômage, etc. ce gouvernement a-t-il pris des dispositions pour solutionner ces différents problèmes auxquels la nation est en train de faire face ?
MYG : Après les émeutes de la faim en avril dernier, alors que le chef de gouvernement se faisait censurer au parlement, Préval est venu avec une équipe qui allait chercher des solutions à ces problèmes, mais pour un mois. Aujourd?hui ce que nous constatons, est que les prix des commodités de première nécessité sont trois fois plus chers. Cela veut dire qu?il n?y a pas eu de solution. La présidence avait axé son intervention uniquement sur le riz. Aujourd?hui le prix du pétrole a baissé sur le marché international. En Haïti il est toujours à la hausse. Le kérosène utilisé pour les lampes est très cher et rare, dans un pays où il n?y a pas d?électricité. Il n?y a aucune solution pour adresser le problème de la faim. Il n?y a aucun plan pour réduire la misère. La situation était devenue plus alarmante. Avec ces cyclones qui viennent de frapper cruellement la nation haïtienne, et qui a tout emporté. C?est de la Guadeloupe que nous sommes en train de recevoir de l?aide alimentaire. Alors que la récolte de riz était pour le mois prochain, toutes nos plantations de la vallée de l?Artibonite, ont été ravagées, emportées par les flots. Les paysans sont livrés à eux-mêmes. Ils ont tout perdu, cheptel et agriculture. D?ici novembre prochain, Haïti va connaître de vrai moment de famine très difficile.
RB : Considérant les prédictions que vous venez de faire, ayant un nouveau gouvernement qu?on vient d?installer, le nouveau premier ministre a sollicité du peuple haïtien un moratoire de 6 mois, d?ici février 2009.
Qu?est-ce qui va arriver ? Sera-t-on face à une impatience des masses affamées, ou est-ce qu?on accordera à ce gouvernement le moratoire sollicité ?
MYG : Ce que je peux dire, « Ventre vide n?a pas d?oreille », « Grangou paka tann ! » On ne peut renvoyer la faim pour demain. La nourriture est un passage obligé. S?ils n?ont pas une solution d?urgence rapide on aura des surprises malheureuses. On aura du grabuge ! « Pral gain rèle ca Macorel ! » La famine est au seuil de la majorité des maisons de famille. Ceux qui ont de l?argent peuvent ne rien trouver pour acheter. Ceux qui sont plus violents qu?eux, peuvent leur ravir l?argent. Ce sera l?anarchie. Malheureusement, il n?y a rien de la part du gouvernement pour parer à cette fatalité. Je ne suis pas d?habitude une pessimiste. Cette fois-ci je suis très inquiète et très concernée. Nous nous inquiétons pour les jours qui viennent.
RB : Quand on parle de FAO qui veut faire des interventions en Haïti dans le domaine agricole.
Comment voyez-vous que la FAO va intervenir dans ce domaine ?
MYG : Si la FAO intervient et qu?elle le fait avec transparence ce sera bien. Mais si elle politise ses interventions, ou l?aide qu?elle veut apporter, ou qu?elle ait une fausse analyse, elle peut créer plus de problème. Il faut qu?elle aille sur le terrain, rencontrer le paysan et trouver avec lui la solution qui convient en vérité à la réalité. La solution ne peut pas se concevoir enfermée dans les bureaux du ministère. Il faut que la solution soit d?abord pratique. Le ministère veut allouer six cent millions de gourdes pour l?état d?urgence qui est déclaré. Comment va-t-on faire la gestion de ces fonds ? Comment va-t-on intervenir dans chaque Département affecté par les intempéries ? Quel est l?appui que l?on va donner aux paysans ? Ils sont totalement appauvris. Ils ne peuvent ni se vêtir, ni se nourrir pour le moment.
RB : Vous venez de dire, s?il n?y a pas un résultat rapide qui fait la différence, qui est palpable et tangible, que pensez-vous qui peut arriver ?
MYG : On peut aboutir à n?importe quoi ! Dans les endroits où l?on distribue de la nourriture les gens sont d?une agressivité inhabituelle. Ils agressent même ceux qui viennent dans le cadre de la distribution de l?aide humanitaire pour les aider. Cette agressivité inhabituelle est inquiétante. C?est un comportement contraire à la culture et aux habitudes du paysan. C?est sans aucun doute l?expression d?un ras-le-bol collectif. Ont-ils vraiment atteint ou dépassé leur seuil de tolérance ? Les émeutes de la faim peuvent ressurgir avec plus de détermination et de violence. On peut aboutir à une société déchirée et mise en lambeau. C?est ce qu?il faut éviter. Il ne s?agit pas seulement de critiquer le gouvernement. Il faut déterminer ce qu?il faut faire. Il y a des haïtiens de la Diaspora qui ont déjà manifesté leur solidarité. Il faut faire ce qu?on peut, pour éviter un autre désastre. Je le répète, on ne plus attendre. On ne peut pas renvoyer la faim ni la solution.
RB : Après les émeutes de la faim, on se plait à dire que « la marmite est en train de bouillir. » La rentrée des classes c?est pour le mois prochain.
Qu?est-ce que vous voyez comme attente ? Quel est le niveau de frustration ?
MYG : Honnêtement, il faut le dire que la rentrée des classes a eu lieu. Il y a plusieurs écoles qui sont déjà ouvertes. On les a fermé. Toutes les écoles ne devraient ouvrir au 8 septembre. Je parle en connaissance de cause. Je ne veux pas citer leurs noms. La plupart ceux sont des écoles congréganistes. C?est un harcèlement contre les écoles congréganistes. C?est bien dommage ! On a renvoyé la réouverture pour octobre. Peut-on pénaliser un groupe, lorsque c?est l?Etat qui n?assume pas ses responsabilités ? Peut être on peut dire qu?il n?y a pas de solidarité. J?aimerais que les choses se fassent selon une certaine logique et non arbitrairement. On ne peut pas frustrer un parti au détriment d?un autre. Il fallait une négociation pour que les intérêts tous les soient satisfaits. Prenons une commune comme Cabaret, la plupart des écoles sont détruites. Quel est le plan de l?Etat pour reconstruire toutes ces écoles en quelques semaines ? Jusqu’à aujourd?hui rien n?est fait. Le renvoie de la rentrée des classes n?empêchera pas qu?elle se fera inévitablement sur fond de crise. On a une crise économique qui ne peut pas se solutionner en un mois. Il y a beaucoup de réflexion à faire sur cette réalité.
RB : Quelle est la réaction du peuple face déjà cette réalité ?
MYG : Le peuple est jusqu’à présent sous le coup d?un choc et d?une forte émotion, la dévastation des intempéries, l?état de pauvreté et de délabrement dans lequel il vit. On est dans un état de crise générale. Il y a ceux qui ont déjà acheté les livres qui sont emportées par les flots. Plus grave encore, il y a aussi des enfants qui ont été emportés.
RB : Le gouvernement dit avoir voté six cents millions de gourdes. Il y a-t-il un plan d?allocation pour la répartition de ces fonds ?
MYG : On a expliqué comment on va allouer ces fonds par département. La communauté internationale va aussi contribuer à ces fonds. Mais on n?a pas expliqué avec précision comment les ministères vont gérer ces fonds. En d?autres termes le plan opérationnel n?est pas encore rendu public. Le premier ministre a déclaré qu?on a dépensé seize millions de gourdes pour le Département de l?Artibonite. Trois millions de gourdes pour le Sud-est. Douze millions de gourdes a été utilisés pour l?achat de nourriture pour les sinistrés dans la zone du Nippes et de l?Artibonite. Il y a un million de gourdes allouées pour chacun des Départements gérés par la CNE, pour la reconstruction des routes. Mais le plan opérationnel de gestion n?est pas encore rendu public. Nous espérons que sous peu ce sera rendu public.
RB : Il y a une certaine inquiétude. On a un nouveau gouvernement en place, mais on ne voit pas encore une prise en charge.
Qu?est-ce que vous voyez ?
MYG : Les débuts sont toujours difficiles, quand on n?a pas été dans les rouages de l?Etat. Cette situation très difficile. Il faut voir qu?elle vient juste de s?installer comme premier ministre. Mise à part les ministres qui ont été reconduits, ils n?ont pas encore saisi fermement les leviers de commande au niveau des ministères. Nous espérons qu?ils comprennent que le peuple attend d?eux des résultats à très court terme.
RB : Le chef d?état qui est à son second mandat depuis 28 mois.
Quelle est votre opinion sur son comportement ?
MYG : Je n?ai pas encore entendu le chef d?état dans aucun communiqué à l?endroit des victimes ou de quoique ce soit d?autre. Nous nous gardons de nous prononcer à ce sujet, parce qu?il n?a pas l?habitue de communiquer avec le peuple. Cependant le premier ministre a fait plusieurs interventions. Le chef d?état pas. Il choisi de ne pas se positionner par rapport aux morts, ni aux désastres.
RB : Quand nous observons le comportement de la communauté internationale, comment appréciez-vous son intervention ? Il y a-t-il un enthousiasme ? Fait-elle confiance à ce gouvernement ?
MYG : Haïti est aujourd?hui dans une situation difficile. Dans le passé Haïti a aidé d?autres nations dans leur période de besoin d?émancipation des régimes colonialiste. Ces pays aujourd?hui tendent la main à Haïti. Ils veulent aider. Est-ce que l?aide sera bien gérée voilà le hic. Mais il y a une vraie volonté d?aider Haïti. La Dominicanie est venue avec 7 cliniques mobiles. On sent qu?il y a des choses qui vont arriver. Il demeure avant tout la responsabilité des autorités haïtiennes de prendre en charge la mise à exécution des solutions.
RB : Et les médecins cubains que font-ils ?
MYG : Ils sont déjà sur place. Ils travaillent plus dans la province. Il y a une enquête qui se mène dans l?Ouest et dans l?Artibonite a cause de patients opérés qui deviennent aveugles.
RB : Il y a-t-il une pénétration profonde du milieu rural par ces médecins, ou est-elle superficielle ?
MYG : Je ne peux pas vraiment faire cette évaluation. Ils peuvent vraiment vouloir pénétrer, s?ils trouvent l?opportunité. Ont-ils l?encadrement nécessaire pour faire cette pénétration ? N?y a-t-il pas aussi un problème d?éducation ? Visiter le docteur c?est bien. Mais le suivi, les analyses, les médicaments etc. Il y a des responsabilités qui relèvent de la responsabilité du patient. C?est pour cela que nous nous gardons de donner une réponse.
RB : Vous venez de dire que la Dominicanie a envoyé 7 cliniques mobiles. Les autres pays donneurs d?aides, font-ils aussi des apports dans le domaine médical ?
MYG : Les autres pays ne veulent pas de duplication de l?aide. Les Etats-Unis apportent la nourriture et l?eau. Les apports se font à différents niveaux et dans différents domaines.
RB : Si vous devez faire une évaluation du nombre de morts à date au cours des 4 cyclones, quelle en sera l?estimation ?
MYG : La Protection Civile a accusé plus de 362 morts. Il y a 5 qui sont morts hier. Et avant-hier il y en a eu 2. Il faudra augmenter le nombre des morts en y ajoutant les 7 nouveaux morts. Mais les journalistes ont accusé presque 500 morts. Il y a 850,000 sinistrés. 151,000 qui sont sans abri. Il y a 186 blessés et 50 disparus, 10,842 maisons détruites, 35,000 maisons endommagées, 6 ponts détruits. On ne peut pas évaluer les pertes de bétails et des jardins qui sont ravagés.
RB : En évaluant l?effet du passage du cyclone Ike sur Cuba, on croit qu?il a causé un recul de 20 ans.
Qu?est-ce que vous estimez que le recul soit en Haïti pour ces cyclones ?
MYG : Je ne suis pas une statisticienne, mais je dirais qu?au minimum c?est un recul de 10 ans de recul pour ce que j?ai constaté comme destruction. Dans une grande proportion l?eau potable n?est pas disponible. La situation est alarmante. N?étant pas une statisticienne, je ne peux pas offrir d?évaluation statistique.
RB : Constatant l?état actuel des choses, sommes-nous dans un état de paralysie face aux désastres, ou il y a-t-il un progrès manifeste qui se développe ?
MYG : Au niveau de la société civile et du secteur privé, il y a un apport considérable, pour prévenir le pire. Au niveau de nos dirigeants, on ne peut pas dire autant. On est en train d?observer avant de nous prononcer. Il est un peu tôt. Mais ceci suscite des inquiétudes.
RB : Je vous remercie pour votre participation très brillante à notre émission, comme de coutume. Et je souhaite vous inviter une prochaine fois.
MYG : A nom du RNDDH je remercie tous les auditeurs et auditrices de Radio Classique Inter. Je leur dis rester souder à Haïti leur patrie. Il ne faut pas se décourager. Il faut porter secours à Haïti. Parce que Haïti a besoin de l?aide de tous pour sa récupération. Il ne faut pas que nous perdions le pays que nous aimons tous. Je vous dis merci beaucoup. C?est toujours un plaisir de partager avec ceux qui ne sont pas dans le pays, les informations concernant notre Haïti.
Originally: Thèmes de l?Emission de la semaine
La coVncidence de la crise gouvernementale et les intempéries qui coup sur coup viennent de frapper HaVti, met en exergue, d?une part le manque de scrupule de nos dirigeants, leur incompétence, leur insouciance, leur indifférence, et de l?autre le degré de misPre, de pauvreté, de souffrance, et de vulnérabilité d?un peuple appauvri par le chômage et le désÉuvrement, d?un peuple tenaillé par la faim et livré B lui-mLme. Malgré le spectacle horrible des dévastations, des pertes de vies et de biens dont les GonaVves ont été victimes avec le passage de l?ouragan Jeanne en 2004, les quatre cyclones qui ont frappé et dévasté l?agriculture et l?économie des petits paysans en 2007, rien n?a été fait pour remédier aux dévastations. Rien n?a été fait pour prévenir, pour protéger et pour minimiser l?effet des désastres sur la population. Alors qu?HaVti a un bureau météorologique, l?arrivée du cyclone Hanna, n?a pas été annoncée sur tout le territoire, pour inciter les populations urbaines et rurales B se mettre B couvert, B se protéger, B prendre des mesures de précaution. L?arrivée de Hanna a surpris les riverains de la presqu?île du Sud. En lieu et place du gouvernement ceux sont des journalistes de la région qui font, par téléphones cellulaires, des efforts de communication pour contacter les sinistrés. Ceux sont des stations de radios privées qui ont organisé l?effort de coordination et de communication. Et c?est B travers l?Internet que des individus collectivement s?efforcent B venir en aide aux sinistrés. Les donneurs d?aides étrangPres, B cause de la réalité de la corruption gouvernementale, sont obligés d?organiser eux-mLmes la distribution de l?aides qu?ils offrent. Ce n?est pas par hasard que les quatre cyclones Fay, Gustav, Hanna et Ike en un mois, ont causé une hécatombe.
Force est de constater et surtout de comprendre que le pouvoir prévalien conscient du niveau élevé du seuil de tolérance des masses appauvries, n?a jamais pris et ne prendra jamais au sérieux, ni leurs souffrances, ni leurs besoins, ni leur sort. Au contraire, il compte absolument sur leur endurance et leur passivité, pour se concentrer uniquement B consolider et B augmenter l?omnipotence de son pouvoir personnel. L?exploitation B fond du seuil de tolérance élevé des masses, est un élément fondamental de sa stratégie de confiscation de l?appareil étatique.
Il n?y a pas que les partis politiques et leurs chefs qui ont été apostrophés et humiliés. L?arrLté présidentiel de nomination du cabinet ministériel du premier ministre désigné avant la ratification de sa déclaration de politique générale, est un affront B la pertinence, du vote du Sénat. La ratification de la déclaration de politique générale du premier ministre désigné ne peut pas Ltre une simple formalité. C?est un droit que la Constitution réserve au Sénat, indépendamment du vote de la chambre basse. C?est la responsabilité du Sénat, d?évaluer la politique générale, par rapport B l?ensemble des problPmes que présente la conjoncture. Et de s?assurer que cette politique soit adéquate, en adressant spécifiquement chacun des problPmes que confronte le pays. Le refus de Préval de faire le retrait de cet arrLté inconstitutionnel, est une preuve irréfutable de son arrogance, de sa volonté de s?ériger en élément de blocage, pour imposer sa volonté en foulant au pied l?article 158 de la Constitution de 1987. Le Sénat en cédant, devient son complice en entérinant une violation constitutionnelle. Ceci équivaut au démantPlement de garde-fou érigé par cette Constitution, contre les abus de l?omnipotence présidentielle. L?exploitation de la situation d?urgence causée par la coVncidence des intempéries, ne peut pas constituer non plus une justification pour cette fuite en avant, violant intentionnellement la Constitution. Le besoin urgent d?avoir un gouvernement, supplante-il celui du respect des institutions et de la Constitution ?
Soudainement, tard dans l?aprPs-midi du mercredi 3 septembre 2008, comme un deus ex machina, Fritz Longchamp le secrétaire général du palais national, annonce par le communiqué suivant :
« Dans un esprit de compromis, en vue de faciliter la résolution de la crise gouvernementale, le président René Préval a accepté que l?installation du gouvernement ait lieu aprPs le vote sur la déclaration de politique générale du premier ministre par le sénat.
Il est prévu que le premier ministre, MichPle Duvivier Pierre Louis, se présente devant le sénat le jeudi 4 septembre 2008.
Fritz Longchamp, secrétaire général du palais national »
Ce communiqué ne constitue pas un retrait de l?arrLté présidentiel nommant le cabinet ministériel. Or c?est le fait de nommer des ministres par un arrLté présidentiel avant la ratification de politique générale du premier ministre désigné, qui constitue la violation constitutionnelle. Ce délai consenti, pour permettre au Sénat d?évaluer la politique générale du premier ministre désigné, maintenant l?arrLté présidentiel tel quel, est la manifestation ostensible et sans équivoque de la volonté de Préval d?installer ce cabinet ministériel, peu importe le résultat du vote du Sénat. Ce compromis, sans le retrait de l?arrLté présidentiel, réduit la déclaration de politique générale du premier ministre désigné, au niveau d?une simple formalité. En d?autres termes, Préval n?a pas permis au Sénat de sauver la face. Au contraire il a foulé au pied, la pertinence de son vote. Préval aurait pu faire le retrait de l?arrLté présidentiel, avoir le vote du Sénat sur la déclaration de politique générale, et présenter ensuite, un autre arrLté nommant les mLmes ministres. Evidemment, un tel geste serait contre-nature, mLme entre populistes de mLme tendance.
Prévale n?est pas le seul a abonder dans l?exploitation du chantage populiste. MichPle Pierre-Louis n?y va pas de main morte. Il ne faut jamais oublier le fait que MichPle Pierre-Louis le jour de sa déclaration de politique générale B la chambre basse, elle est sortie de la chambre pour s?adresser aux chimPres venues au devant du palais législatif pour menacer les députés. Ce qui est grave et impardonnable, elle ne les a pas congédiées. La question est de savoir d?oj venaient ces chimPres ? De Martissant. LB oj se trouvait FOCAL, son ONG ! La visite du nouveau tandem Préval/Pierre-Louis B la Cité Soleil, avant la session du Sénat, quel en était le but ? Quant le premier vote n?avait pas ratifié le premier ministre désigné jeudi soir, l?ordre de mobilisation avait été lancé. Le second vote l?ayant ratifiée, les chimPres ne sont pas venues au palais législatif. Certes, comme pour la convocation de la presse B l?installation du cabinet ministériel le mardi 26 aoft 2008, ils persisteront B le nier !
Les membres des mouvements féminins et féministes qui, tout au début, sont montés au créneau pour défendre MichPle Pierre-Louis, sont aujourd?hui plongés dans un silence éloquent. Stupéfaits, mais n?étant pas de la derniPre averse, ils sont en train d?observer les effets de l?appas du pouvoir et la métamorphose de la nouvelle MichPle Pierre-Louis qui se révPle. La loyauté est une vertu noble, certes. Mais envers qui, quand et pourquoi, voilB le hic ?
Certainement, la légitimité du premier ministre vient spécifiquement et exclusivement de sa ratification par les deux chambres du parlement. Et c?est précisément ce garde-fou, dans le régime semi-parlementaire, qui le protPge contre tout excPs d?omnipotence présidentielle. En effet, MichPle Pierre-Louis n?est pas la seule B bénéficier du compromis. Heidi Anabi est allé B l?extrLme pour que ce soit un premier ministre de jure qui paraphe le renouvellement du mandat de la Minustah le mois prochain. René Préval et MichPle Pierre-Louis, lui devant une dette éternelle, signeront des quatre mains.
Néanmoins, les conditions dans lesquelles MichPle Pierre-Louis a obtenu cette légitimité, et surtout la façon dont son cabinet ministériel a été formé, ne tendent absolument pas B consolider, ni son pouvoir, ni son autorité. Préval ayant reconduit les titulaires des 8 ministPres les plus importants du gouvernement, confisque automatiquement et exclusivement leur loyauté inconditionnelle. Dans un contexte pareil, force est de constater et d?admettre, qu?en entrée de jeu, elle s?est fait damer le pion par Préval.
Compte tenu des dévastations cycloniques et le cauchemar de la rentrée des classes venant tôt ou tard s?ajouter aux problPmes qui ont sous-tendu les émeutes de la faim, on est malgré tout, B une nouvelle croisée de chemin. On vient de refaire les cartes, soudoyant la chambre basse, foulant au pied la pertinence du vote du Sénat, pour forcer la ratification d?un nouveau premier ministre piégé au départ par Préval. Mis B part sa marotte de confisquer toutes les élections et son obsession de vouloir se succéder, par le biais du remplacement de la Constitution, qui rempliront l?avant-scPne, qu?est-ce que ce nouveau premier ministre pourra faire pour se distinguer ? Tant mieux pour Prévale, il ne saurait trouver meilleure compagnie pour sa décente aux enfers, que MichPle Pierre-Louis.
Originally: Que Dieu protège Haïti!
August 23, 2008
« La plus grande bataille que je vais mener sera celle de convaincre les
Haïtiens de la nécessité d?adopter une nouvelle constitution » a affirmé
sur Radio Ibo à Santo Domingo, le Président René Préval en dénonçant la
Constitution de 1987 comme une source permanente d?instabilité politique.
L?instabilité politique actuelle a débuté avec la bavure de l?hôtel
Montana, le comptage des votes blancs et l?éclipse du second tour des
élections présidentielles de février 2006. Tant et aussi longtemps qu?on
refuse d?accepter la décision des urnes en bradant les prescrits de la loi,
il n?y aura aucun répit politique en Haïti. Le mode de scrutin, l?absence
d?un programme de gouvernement, le refus d?organiser les élections
partielles sont les principales sources d?instabilité permanentes.
Coalition, Convergence, Concertation, Espace etc. autant de marionnettes
qui ont joué leurs numéros sur le Théâtre National moyennant leurs
prébendes. Un simple remaniement ministériel peut provoquer un changement
de camp, renverser la majorité au Parlement et basculer le système.
Nous vivons sous un régime politique mixte. Le Président de la République
aussi bien que le Corps législatif sont élus au suffrage universel. A
l?échelon national, compte tenu du scrutin majeur, la présidentialisation
du pouvoir est mal venue. Les expériences malheureuses d?un passé
politique récent où le Président tout puissant en faisait à sa guise, ont
porté le Législateur à aménager un garde-fou pour éviter certaines dérives
en créant le poste de Premier ministre. Il détient tous les leviers du
pouvoir avec une dimension socio-économique incontournable. Son envergure
politique souvent fait ombrage au Président de la République. La lutte pour
le pouvoir exacerbée par le clientélisme et le népotisme met souvent en
brouille les deux têtes de l?Exécutif. Une cohabitation aussi conflictuelle
déstabilise le jeu politique, gêne les initiatives économiques et
empoisonne la vie sociale haïtienne.
L?aspect le plus crucial de la problématique c?est que LESPWA n?a pas une
majorité absolue au Parlement. Logiquement il est obligé de composer avec
les autres Partis qui disposent d?une majorité relative pour obtenir le
quorum. Cependant le Parti au pouvoir détient le levier financier. En
conséquence il peut réduire les Partis de l?Opposition à leur plus simple
expression en leur tenant la dragée haute, les affamer pour forcer leurs
accords et le cas échéant les démolir. Le Chef de l?Exécutif dispose d?une
grande marge de man?uvre pour fabriquer l?Opposition qu?elle souhaite selon
les besoins de sa politique. La barrière idéologique constitue le seul
rempart contre la manipulation du puissant locataire du Palais national.
Les conditions de misère certains Chefs de nos Partis, les forcent à
changer même secrètement de camp sans pour autant renoncer publiquement à
leur appartenance idéologique initiale. Le choix éventuel de Suzy Castor au
Ministère des Affaires étrangères illustre bien ce cas inquiétant de
défection politique.
La variabilité de comportement de nos leaders les plus proéminents
constitue une grande source d?instabilité. L?instrumentalisatio n par le
Président René Préval des représentants du peuple au Parlement brouille
les cartes. La discipline de Parti n?est quasiment plus respectée. Une fois
de plus nous rendons publiquement nos hommages à l?esprit d?indépendance et
de perspicacité des militants de l?OPL qui en dépit des adversités restent
fidèles à leurs principes directeurs. Une hirondelle ne fait pas le
printemps, mais elle l?annonce. Après les élections nos Parlementaires se
comportent en de véritables rebelles pratiquant le marronnage ou
s?associant à des groupes de pression sans aucun rapport avec les Partis
politiques qui les ont élus. La culture politique haïtienne invite les
protagonistes à se rapprocher des ressources publiques en oubliant comme
leur première casaque même le slogan de leurs formations politiques. «
Nation avant Pouvoir » n?a plus de sens pour le CHEVAL qui, avec la bouche
remplie d?herbe, ne peut plus hennir. Avec ce cheptel d?hommes politiques
nomades toujours à la recherche du vert pâturage, en Haïti la stabilité
politique ne sera jamais au rendez-vous.
La principale source d?instabilité politique en Haïti c?est l?inconstance
de nos leaders politiques et l?inconsistance de leurs lignes idéologiques.
Aussi, souffrent-ils d?une grave crise de légitimité ! Toute tentative de
changement constitutionnel en vue du contrôle strict du pouvoir va donner
lieu à une instabilité pire qu?avant. Le désespoir d?une population
désillusionnée par les effets dévastateurs d?un Grangou Klorox sera le
détonateur d?une explosion sociale. Le climat est propice à l?insurrection
populaire, aux émeutes, aux manifestations que les forces de l?ordre ne
sauront réprimer dans le sang. Le projet chimérique de Préval de changer la
Constitution de 1987 va lézarder davantage l?unité nationale. Une grave
crise de régime politique est en gésine à cause de la volonté manifeste du
Président René Préval de retourner avec un pouvoir politique fort en
éliminant la Primature, la Chambre du Sénat, les Asecs et les Casecs.
Préval entend rééditer fidèlement la stratégie de François Duvalier en 1964
et en 1970 en adoptant le même calendrier politique. Au fort des élections
américaines traditionnellement réalisées en novembre, la politique
haïtienne importe peu pour l?establishment américain. C?est la période
idéale pour entreprendre certains changements politiques majeurs en Haïti.
Cependant la précarité de la situation économique constitue un obstacle
important à la réalisation de son dessein. Avec les prix des produits de
première nécessité et le coût du gallon d?essence qui ne font que grimper,
les tentatives audacieuses de l?oligarchie nationale pour s?accaparer des
richesses du pays vont radicaliser les forces politiques et accroître le
mécontentement des déshérités du sort. Le Président René Préval compte
balayer les obstacles par la violence politique, en instaurant un régime
autocratique secondé par les chimères. La ploutocratie emprunte le couloir
légal pour assurer ses acquêts, malgré la paupérisation des 4/5 de la
population. Daly Valet nous demande de nous taire, mais comment ! La
vibration est plus forte que notre état d?âme. La loi de l?Omerta et la
fragmentation de l?espace politique constituent le ferment idéal pour le
remodelage de la Constitution à leur guise. La 49e législature ne sera
qu?une simple Chambre noire visant à reproduire et à épingler légalement
les photos de l?album politique que l?Exécutif veut exposer à la vue de
tous. Que Dieu protège Haïti!
Nous sommes tous Haïtiens, Bon Dieu !
Arrêtons, une fois pour toutes, de nous diviser en classes : le peuple contre les bourgeois et vice-versa, les Noirs contre les métis.