Originally: Fusillade en Haïti pendant la visite de Colin Powell

Des inconnus, partisans présumés du président déchu Jean Bertrand Aristide, ont ouvert le feu mercredi 1er décembre en direction du Palais présidentiel pendant la visite du secrétaire d’Etat américain, Colin Powell. Les casques bleus de la Mission de stabilisation des Nations unies en Haïti (Minustah) ont immédiatement riposté.
“Des gardes ont échangé des tirs avec des tireurs présents à l’extérieur du périmètre” du Palais, a déclaré un haut responsable américain sous couvert de l’anonymat, à Washington. Le secrétaire d’Etat et sa délégation sont saufs mais les entretiens vont être déplacées à un autre endroit”, a précisé le responsable américain.
Après la fusillade, des coups de feu sporadiques ont continué à être entendus par les journalistes présents au Palais pendant une demi-heure avant de cesser complètement peu après 16 h 30 GMT (17 h 30 à Paris). La place jouxtant le Palais, un vaste bâtiment blanc entouré de grilles, était désertée. A l’intérieur de la présidence, des gardes du corps américains, équipés de gilets pare-balles et solidement armés, observaient des fenêtres les abords du Palais.
Colin Powell, qui doit prochainement quitter le département d’Etat, était arrivé à 14 h 30 GMT (15 h 30 à Paris) en hélicoptère au siège de la présidence haïtienne où il devait à l’origine passer l’essentiel de la journée. Lors de sa brève visite, il devait s’entretenir avec le président provisoire haïtien, Alexandre Boniface, et des responsables du secteur privé et de la société civile. Le chef de la diplomatie américaine devait aussi visiter un centre de soin contre le sida financé par les Etats-Unis, à l’occasion de la Journée mondiale, mercredi, de lutte contre cette pandémie.
INQUIÉTUDE DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE
Cette visite, la deuxième de Colin Powell depuis le départ d’Haïti d’Aristide le 29 février, survient dans un pays toujours secoué par des violences sporadiques qui ont fait environ 150 morts ces deux derniers mois, selon un bilan des organisations de défense des droits humains. La précarité de la situation préoccupe la communauté internationale, dont les Etats-Unis, le Canada et la France qui se sont engagés militairement lors du départ de Jean Bertrand Aristide ainsi que les Etats latino-américains qui composent l’essentiel de la Minustah, dirigée par un général brésilien.
Cette inquiétude est d’autant plus vive que les casques bleus font l’objet de critiques des milieux politiques haïtiens et de la population, exaspérés par la répétition des violences. A sa décharge, la mission de l’ONU ne peut s’appuyer que sur un peu plus de la moitié des 6 700 soldats prévus à sa création.
Fin août, une visite en Haïti du secrétaire d’Etat aux affaires étrangères français, Renaud Muselier, avait aussi été marquée par une fusillade de près de deux heures qui l’avait obligé à quitter sous escorte militaire un hôpital qu’il visitait à Port-au-Prince. Dans la capitale, le scénario des incidents est souvent identique. Dans des quartiers ciblés de Port-au-Prince, les assaillants arrivent par surprise, brûlent des véhicules, rançonnent et tuent passants et commerçants avant de s’évanouir avec leur butin.
Les policiers épaulés par la Minustah arrivent pratiquement toujours avec retard sur les lieux, ce qui renforce le sentiment d’impuissance de la population. Certains diplomates voient dans ces actes de déstabilisation la main des narco-trafiquants qui veulent voir perdurer un état de non-droit pour leurs trafics. La France a réclamé récemment aux Etats-Unis de “faire sortir” leurs dossiers sur les trafics de drogue en Haïti.