Exposé de la situation des droits humains en Haïti par devant la commission interaméricaine des Droits de l’Homme

French original of above statement: La démocratie semble être pour la nation haïtienne une illusion d’optique. Plus elle semble à la portée, plus elle est lointaine.


 

22 octobre 2004

NEW YORK (Nations unies), 21 oct (AFP) – Les Nations unies ont mis en garde jeudi les pays voisins de Haïti d?un afflux probable de réfugiés haïtiens sur leurs côtes, si rien n?est fait pour venir en aide à ce pays, le plus pauvre du continent américain.


“Soit vous vous mobilisez pour aider Haïti, soit vous récupérerez de nombreux boat-people dans les prochains mois”, a averti le secrétaire général adjoint de l?Onu aux affaires humanitaires, Jan Egeland.


“Trop peu a été fait”, a-t-il ajouté . “Haïti a perdu quelque 2.000 personnes après les derniers cyclones parce que le pays était très mal préparé, notamment à cause du désordre social qui y règne”, a-t-il souligné.


Après la tempête tropicale Jeanne qui a causé la mort d?environ 2.000 personnes en septembre, Haïti a été touché par une nouvelle flambée de violence, attribuée aux fidèles de l?ancien président Jean Bertrand Aristide, qui a fait au moins 30 morts.


“Il est incompréhensible qu?Haïti, si proche de certains des pays les plus riches du monde, souffre d?un tel manque d?investissement et de si peu d?aide financière pour sa population et pour sa reconstruction”, a dit M. Egeland.


Haïti fait face depuis près d?un an à une instabilité politique chronique et à une situation économique catastrophique. Seulement la moitié des 6.700 soldats qui devraient être déployés dans le cadre de Mission de stabilisation de l?Onu en Haïti (Minustah) sont actuellement sur le terrain.

Originally: Afrique du Sud: les partis de l’Opposition réclament du président Mbeki une enquête sur les accusations portées contre Aristide.

Les leaders des partis de l?Opposition en Afrique du Sud appellent le président Thabo Mbeki à faire le jour sur les accusations portées contre Jean Bertrand Aristide concernant les violences orchestrées par ses partisans en Haïti.


Dans des déclarations faites dans la presse sud-africaine, les dirigeants de l?Alliance Démocratique et du Parti Chrétien Démocrate ont mis en garde contre l?utilisation du territoire de l?Afrique du Sud à des fins de destabilisation d?un autre Etat.


Pour le leader de l?Alliance Démocratique, Tony Léon, le président Thabo Mbeki doit fournir tous les détails sur les activistés de Jean Bertrand Aristide depuis son arrivée à Prétoria. Il estime que le gouvernement doit procéder à la révocation du statut d?invité spécial accordé à Jean Bertrand Aristide au cas où il participerait effectivement aux violences en Haïti.


Pour sa part, le responsable du Parti Démocrate Chrétien, Kenneth Meshoe, estime qu?il n?est pas suffisant que Jean Bertrand Aristide déclare nier les accusations portées contre lui sur le dossier des violences en Haïti. M. Meshoe demande au président déchu haïtien d?intervenir clairement auprès de ses partisans pour qu?ils mettent un terme à la violence qui prévaut à Port-au-Prince dans le cadre de l’opération “Bagdad”.


“Jean Bertrand Aristide doit s?exprimer publiquement et presser ses partisans de mettre fin à la décapitation des policiers et au pillage des magasin du centre commercial “, a conclu Kenneth Meshoe.


——————————-

Latina y el Caribe pierden una de las figuras más relevantes de la intelectualidad y la política, y Cuba un defensor y leal amigo

Un luchador tenaz por el bienestar de las condiciones de vida del pueblo haitiano y se destacó por ser un defensor de las causas más justas de los pueblos latinoamericanos y caribeños.

Originally: Arrestation d’un prêtre catholique en relation avec les violences à Port-au-Prince.

PORT-AU-PRINCE (AlterPresse) – La police a procédé ce 13 octobre à l’arrestation de Gérard Jean Juste, un proche de l’ancien Président haïtien Jean Bertrand Aristide.


L’arrestation de Gérard Jean Juste est liée, selon des sources policières, à l’ « opération Bagad », vague de violence déclanchée depuis le 30 septembre à la capitale par des partisans de l’ancien régime.


Le prêtre a été appréhendé alors qu’il se réunissait avec des sympathisants du parti Famille Lavalas (d’Aristide) dans une école à Petite Place Cazeau (périphérie nord de la capitale).


Jean Juste a été emmené dans un commissariat de la capitale pour être interrogé, ses partisans ayant tiré et lancé des pierres en direction de la police à Cazeau.


Les mêmes sources font état de l’implication éventuelle du prêtre dans l’arrivée récente en Haiti d’une cargaison d’armes illégales devant être mises à contribution dans le cadre de l’ « opération Bagdad ».


Ce 13 octobre, les violences se sont poursuivies dans quelques quartiers du centre-ville commercial de la capitale, faisant, selon la station privée Radio Caraibes, 4 morts par balles, dont une femme de 80 ans.

Originally: Adieu Gérard Pierre Charles

Adieu Gérard Pierre Charles


LE MILITANT POLITIQUE 


Un long itinéraire pour la paix et la démocratie 


    Frappé de tuberculose, Il fut interné durant plusieurs mois au Sanatorium à Port-au-Prince. Il sortit profondément renforcé de cette épreuve qui lui permettant de pénétrer dans ce monde de  laissez pour compte, l’habilita au plan psychologique, à prendre en mains son destin en lui offrant l’occasion d’acquérir une base solide, par la lecture et la réflexion,  à l’humanisme qui a inspiré sa vie.


    Gérard Pierre-Charles né le 18 décembre 1935 à Jacmel, ville connue pour ses traditions libérales et sa fécondité culturelle, est issu d’une famille nombreuse de classe moyenne paupérisée. Il n’a pas connu son père Emmanuel, qui fut inspecteur des écoles et professeur de Lettres au Lycée Pinchinat de la ville. Il a connu très peu sa mère, Eva Bernier qui animait une association nommée Entraide Chrétienne Jacmélienne,  décédée quand il avait 10 ans. Il dut donc, très tôt, faire face à la gêne et aux carences de toutes sortes.


    Très tôt, il a participé au mouvement d’action culturelle dans sa ville natale. A Port-au-Prince, devenu ouvrier à l’Usine de Ciment, il fut le fondateur du Syndicat de cette entreprise et participa au lancement du mouvement syndical à la chute du président Paul Magloire en 1956. Il était alors militant de la Jeunesse Ouvrière Catholique. Il devint co-fondateur en 1957, de la Fédération Ouvrière qui, sous le nom d’Union Inter- Syndicale d’Haïti, s’efforça de défendre les intérêts des travailleurs dans les débuts du régime de François Duvalier.  


    Il fut co-fondateur, en 1959, avec Jacques Stephen Alexis le fameux écrivain assassiné par Duvalier, et Gérald Brisson, un brillant économiste, mort au combat, du Parti d’Entente Populaire, d’orientation marxiste, inspiratrice idéologique et politique de la jeunesse intellectuelle engagée contre la dictature, pour la démocratie et le socialisme.  


    Il n’a jamais cessé d’exalter les valeurs d’héroïsme de ces révolutionnaires des années 60, des femmes et des hommes souterrains de la lutte clandestine qui ont versé leur sang généreux contre le fascisme et pour la libération nationale.  


Un exil de 26 ans pour un cri de liberté 


    En 1960, il dut, comme de nombreux autres Haïtiens, abandonner son pays, vue l ‘ambiance de persécution  créée par le régime de François Duvalier. C’était le début de cette fuite éperdue de milliers d’Haïtiens, de toutes conditions, qui se réfugièrent à l’étranger pour des motifs politiques, exode qui s’amplifia les années suivantes par les effets combinés de la terreur et de la dureté des conditions d’existence. 


    Durant son long exil au Mexique, ses positions d’intellectuel progressiste  et son labeur opiniâtre au service d’Haïti son pays l’ont fait connaître dans ce pays et en Amérique Latine. Figure publique, intervenant souvent dans la presse et par de fréquentes apparitions à la TV, son nom était mentionné durant des années 1980  par la publication « Quien es Quien » parmi les personnalités les plus connues au Mexique, dans les sciences, les arts, la politique et les affaires.  


    Etant à l’étranger, il exerça des responsabilités au sein du Parti d’Entente Populaire et du Parti Unifié des Communistes haïtiens. Il fut promoteur du Comité Démocratique Haïtien de Mexico, une organisation réunissant diverses tendances. 


Défenseur des causes les plus nobles de l’humanité 


    Il se prononça contre l‘intervention militaire des USA en République Dominicaine en 1965.  Dès  cette époque, il commença, directement avec un groupe de militants clandestins basés en République Dominicaine et réunis au sein de l’Union Démocratique des Emigrants Haïtiens, à défendre la cause des travailleurs émigrés et à faire connaître les conditions d’exploitation de ces « braceros » dans les champs de canne, les fameux bateyes, avec la complicité  des oligarchies locales. 


    Il a été aussi l’initiateur des études dominicano-haïtiennes, organisant à l Université de Mexico, en 1971, la première rencontre  entre intellectuels et spécialistes des Sciences Sociales des deux pays. Il a toujours plaidé en faveur de l’harmonisation, la collaboration, l’amitié et la coopération la plus étroite possible entre les deux Etats… 


    Il a contribué, durant les années 70 et 80, par des conférences, des  articles et tout un travail d’orientation, avec les mouvements contre la discrimination et pour la promotion des noirs à Panama, en Colombie et au Brésil; il a exprimé, par ses écrits et par des actes, sa solidarité en faveur de la Révolution Cubaine, dans  sa signification caribéenne,  latino américaine   et a niveau du Tiers Monde. Il a  aussi défendu le Vietnam héroïque, le peuple de l’Afrique du Sud en butte à l’Apartheid, les peuples d’Uruguay, l’Argentine du Chili, du Nicaragua, El Salvador, Guatemala,  victimes de la violence et des dictatures militaires. 


    Au fil  de son long itinéraire de combattant de la paix, il a maintenu des rapports étroits avec des associations internationales telles que Amnistie Internationale, l’Association des Juristes Démocrates, le Conseil Mondial de la Paix, la Fondation Lelio Basso, le Conseil Mondial des Eglises, Washington Office for Latin America, les sections de défense des Droits Humains et de promotion de la démocratie de l’Organisation des Etats Américains, de l’UNESCO et de l’Organisation des Nations Unies. Il a été membre du Conseil Mondial de la Paix. Il est membre titulaire de l’Académie Mexicaine des Droits Humains.  


    Dans ces instances internationales, il a fait entendre sa voix de défenseur des droits humains, en faveur de la solution pacifique et négociée des conflits politiques, la voix d’Haïti en pro de  la solidarité. 


    Cela lui a valu de représenter, durant longtemps, un des principaux porte-parole de la cause de son pays. Haïtien, noir, handicapé, parcourant le monde sur ses béquilles de courage, en quête de solidarité à la lutte de son peuple, son personnage, sa silhouette et sa parole ne pouvaient manquer d’impressionner ceux qui l’écoutaient. Tous ces traits ont fait de lui une figure représentative des minorités exclues, de ces catégories d’hommes sans voix qui, au-delà de leurs particularités ethniques, physiques ou culturelle, portent au plus point et transmettent les valeurs universelles. 


De retour en Haïti pour rassembler et reconstruire l’espoir 


    Gérard Pierre-Charles retourna dans sa patrie en 1986 quelques semaines après le départ du dictateur Jean-Claude Duvalier. Ce retour était l’expression de sa détermination à continuer sa lutte pour Haïti et, aussi, un choix selon une vision de  la militance adaptée à la réalité du pays et du monde.  


    Il estimait en effet qu’il fallait d’un cadre novateur pour rassembler toutes les forces de progrès oeuvrant pour la transformation du pays dans le sens de la démocratie, du développement et de la justice. Une telle plate-forme de rassemblement était inconcevable dans les moules propres du Parti. Cette conviction le porta à s’en éloigner pour continuer la bataille de sa vie orientée par l’humanisme, son sens de la justice et la volonté d’améliorer les conditions de vie de son peuple. 


    Ainsi, le professeur Pierre-Charles s’est évertué d‘éduquer les jeunes, de diffuser l’espoir, de signaler au peuple la voie du changement. Son horizon idéologique et politique s’était élargi à partir de ses réflexions sur l’expérience de l’Amérique Latine, théâtre de multiples courants révolutionnaires et de stratégies politiques qui furent  remises en question par les faits. Tirant profit des apports critiques des milieux intellectuels à ces expériences pleines d’enseignement, synthétisées entre autres par son grand ami mexicain, le Dr Pablo Gonzalez Casanova, en contact avec le mouvement social revendicatif, il commença à redéfinir sa militance en fonction des nouvelles donnes de la situation nationale et internationale. Il se consacra à  monter un réseau réunissant des jeunes, des militants venant des divers horizons de la pensée et de l’action, en particulier de la théologie de la libération, des groupements de base et des mouvements paysans, désireux de trouver des instruments efficaces contre la misère et l’exclusion. 


    Sa quête d’action sociale et de réforme politique efficace l’avait conduit à être un des animateurs de la “Convergence Démocratique et Nationale” en 1990. Il s’agissait d’une initiative d’inspiration non-partisane et patriotique de caractère civique qui convoqua divers secteurs politiques en vue d’un accord électoral pour la présentation d’un seul candidat aux élections présidentielles. Cette initiative conduisit  de fait a un appui à la candidature de Jean Bertrand Aristide, prêtre issu de secteurs populaires qui allumait l’enthousiasme des masses et qui, avec son mouvement ‘’Lavalas ‘’, gagna les élections de 1991. 


    Appréciant le rôle que ce dirigeant pouvait  jouer comme représentant des majorités en faveur  de l’unité de la nation. Pierre-Charles s’évertua d’orienter ce mouvement  et de structurer en son sein, une organisation politique, avec une vision moderne et démocratique.  Cette tâche il la poursuivit après le coup d’Etat contre Aristide en 1991 et durant les trois ans du régime militaire subséquent. 


    Contribuant à organiser la résistance, dans des conditions de risques amplifiés du fait de son handicap physique, il entreprit une action organisée et systématique en vue d’encadrer et d’orienter de nombreux  patriotes engagés dans le combat pour la restitution des droits constitutionnels dans le pays et le retour d’Aristide. 


    Dans cette optique, en même temps qu’il se livre à un patient travail d’éducation dans les milieux populaires et qu’il combat le coup d’Etat et le régime militaire installé, de façon persévérante il continue ses efforts en vue d’organiser et de rassembler les secteurs démocratiques et populaires.     


    Aux compétitions électorales de 1995, ce secteur organisé, représentant une tendance de plus en plus autonome, surgit comme  la principale force électorale du pays. Sa majorité relative aux deux Chambres lui permit de consolider le parlement pour en faire, conformément aux prescrits de la Constitution, une institution indépendante par rapport à l’Exécutif, exerçant pleinement la prérogative de nommer comme Premier Ministre un citoyen issu de ses rangs. 


    Une telle avancée,  en terme institutionnel, garantissait les principes du pluralisme démocratique. Elle heurta cependant les pratiques du présidentialisme qui entreprit de gagner à tout prix le contrôle du Parlement aux élections partielles d’avril 1997. L’OPL  se désolidarisa alors du mouvement Lavalas, adoptant le nom d’Organisation du Peuple en Lutte. 


    En dénonçant les fraudes qui marquèrent les élections parlementaires, l’OPL alerta l’opinion nationale et l’OEA sur les dérives antidémocratiques du pouvoir, qui menaçaient les conquêtes civiques prétendant conduire le pays au règne de la violence et de l’arbitraire. Ainsi, l’opposition parlementaire ouvrit de plus en plus l’espace politique, favorisa l’émergence de la presse indépendante et la croissante participation des organisations de la société civile. 


La coalition du millenium pour le respect des principes démocratiques. 


    Dépassant les mirages et faux espoirs du populisme, cette remontée de la résistance au pouvoir fut un fait historique.  Freinant l’implantation d’un régime autoritaire, elle donna lieu à un mouvement de citoyens en faveur d’une participation combative aux élections législatives de l’an 2000. Le rejet par l’opposition et d’amples secteurs de la population, des fraudes réalisées durant  ces comices suscita la remise en question de leur légitimité par l‘OEA et la communauté internationale.


    L’accès à la présidence de Jean-Bertrand Aristide, bien que le peuple, par une abstention massive,  eut dit non à cette imposture, plongea  le pays dans une  profonde controverse, provoquant  une crise qui dure encore, rendant la population   de plus en plus concernée. Au centre de la résistance  à cette imposition, l’OPL poursuivit son œuvre de rassembler divers secteurs de la société civile dans un front de refus, la Convergence Démocratique. Cette coalition de centre gauche, des principaux Partis politiques, continua, dans la ligne initiée depuis 1997 par l’OPL, à sensibiliser les principaux pays d’Europe, de l’Amérique Latine et le gouvernement des USA contre ces élections cette entreprise antidémocratique. 


    Dans cette perspective, Gérard Pierre-Charles eut des rencontres avec Madeleine Albright, Strobe Talbott, respectivement Secrétaire d’Etat et sous-Secrétaire d’Etat des USA, avec Anthony Lake, ex-Conseiller à la Sécurité Nationale de l’administration démocrate. Les gouvernements de France et du Canada furent aussi  sollicités Ces démarches et l’action politique d’autres secteurs de la Convergence et de la société civile, en particulier, auprès des actuelles autorités républicaines,  amenèrent la Communauté internationale à réagir face au danger représenté par ce pouvoir  pour le présent et l’avenir de la démocratie en Haïti. 


    De là une action soutenue de l’OEA, pour faciliter les négociations entre le Gouvernement et l’opposition et œuvrer à rétablir la normalité constitutionnelle. Ainsi, les campagnes de dénonciation et de mobilisation ainsi que les ardues négociations menées par la Convergence Démocratique renforcèrent, dans le pays et à l’étranger son  image positive  en tant qu’obstacle  à l’absolutisme, porteuse d’une alternative. de progrès. 


    Face à une opposition acquérant une croissante crédibilité et présence politique, le pouvoir réagit avec violence, contre les Partis d’opposition. Ainsi le  17 décembre 2001 les locaux de ces Partis et les résidences de leurs principaux dirigeants  furent pillés et incendiés ; Agression qui affecta le professeur Pierre-Charles, coordonnateur de l’OPL, dans son patrimoine familial et intellectuel, le siège de son Parti ainsi que le centre culturel fondé par lui-même et son épouse.   


    Réagissant avec sérénité à cette dure épreuve en réclamant justice et réparation pour les victimes de ces actes barbares, il en appela au dépassement. Il exhorta les Partis politiques et autres secteurs de l’opposition à continuer le combat démocratique devant avoir raison de la violence, paver la route à la réconciliation et à l’avènement de la paix et du renouveau en Haïti.


Nou pa p janm bliye ou Papi Charles


Johnny Bélizaire

Originally: De Gonaïves à Bagdad : du purgatoire aux portes de l’enfer

Six mois après l’arrivée au pouvoir du Gouvernement de transition, celui-ci se trouve confronté à une situation insoutenable. Alors que sur le devant de la scène on redoutait le passage d’Yvan et les intransigeances des militaires démobilisés pouvant mettre écologiquement et politiquement la nation en danger ; la mort et la terreur sont venues se faufiler à travers un autre sillage : Gonaïves et l’Opération Bagdad. Le Nord du pays dévasté par la tempête Jeanne a constitué un choc national et international : en une soirée doublée de deux cents ans d’incurie, la Cité de l’Indépendance aura enregistré plus de victimes que les attaques terroristes contre le World Trade Center à New York, le 11 septembre 2001. Alors que la nation haïtienne n’avait pas encore fini de compter, pleurer et d’enterrer ses morts, une autre tempête – diabolique cette fois- s’est abattue sur la capitale à travers l’Opération Bagdad lancée par les partisans de l’ex-dictateur Jean-Bertrand Aristide. Des images du déluge torrentiel et de corps ensevelis ou emportés par la boue aux Gonaïves, on est passé au spectacle terrifiant de corps décapités, parmi lesquels ceux de policiers. Les Gonaïves auraient pu constituer notre purgatoire mais avant même d’avoir purger nos peines, nous voilà aux portes de l’enfer. Le moment de vérité a sonné : ou nous prenons et imposons notre responsabilité historique et collective pour réussir la dernière transition démocratique, ou nous basculons à jamais dans l’irrémédiable pouvant nous mener tout droit en enfer.


Gonaïves 2004 ou le symbole de l’échec de tout un peuple


L’hécatombe historique des Gonaïves qui a fait près de 3000 morts et plus de 250.000 sinistrés a transformé le berceau de la révolte des esclaves de 1791 en véritable cloaque morbide où plane encore l’odeur putride de la mort. Ce haut lieu de notre Indépendance nous renvoie aujourd’hui le miroir tragique de notre inconscience et irresponsabilité collective. En 2004, la ville des Gonaïves est devenue le symbole de notre échec en tant que nation et en tant que peuple. En cette année de notre Bicentenaire, nous devons admettre que notre révolution s’est évaporée en laissant derrière elle le dépôt de deux siècles d’incurie, de dictatures, d’une société irresponsable et immorale qui devrait absolument faire son introspective pour changer sa mentalité, ses mœurs et sa gouvernance catastrophique. Contrairement à ce qu’avait dit le philosophe Jean-Paul Sartre, à savoir que ‘’l’enfer, c’est les autres’’, en Haïti, l’enfer c’est nous !  Si la tragédie des Gonaïves est la rançon de notre incurie et de notre absence totale de responsabilité face à la dégradation menaçante de notre environnement ; elle aurait pu constituer aussi un choc salvateur pouvant nous secouer, nous réveiller, nous faire prendre conscience de notre inconscience. Elle aurait pu être notre purgatoire où nous aurions purgé nos peines pour, dans un sursaut national, redresser la barre de nos tares autodestructrices et de notre pulsion suicidaire. Mais non ! Malgré un mouvement de solidarité des Haïtiens dans le pays aussi bien qu’à l’étranger, nous avons choisi, une fois de plus, l’immoralité : le deuil national décrété par la présidence n’a pas été respecté. Pire ! Alors que le monde entier se mobilisait pour venir en aide aux victimes, des gangs haïtiens attaquaient les convois humanitaires destinés à ces dernières, zombifiées, assoiffées et affamées depuis le déluge mortel du 18 septembre. Pendant que MINUSTAH, critiquée par nos compatriotes pour son inaction, était débordée sur le terrain et essayait de faire face, seule, à une catastrophe humanitaire d’ampleur historique dans la région ; les Haïtiens n’étaient pas capables, notamment par manque de structures, d’organiser les secours ou la distribution des vivres. Malgré notre élan de solidarité, nous avons raté l’occasion de projeter une autre image de nous-mêmes aux nôtres et au monde entier- comme les Américains ont su le faire après le 11 septembre 2001- et les actes de pillages et de brigandage de jeunes gangs contre les convois de nourriture et d’eau prouvent que ce pays est profondément malade et dérive sur des pentes de plus en plus dangereuses, de plus en plus honteuses. On ne peut en aucun cas attribuer l’hécatombe de Gonaïves à une malédiction divine : ce serait encore chercher l’échappatoire de l’irresponsabilité. Pendant plus de cinquante ans, les experts en écologie ont tiré en maintes fois la sonnette d’alarme. Alors que les catastrophes naturelles sont prévisibles, nous avons choisi sciemment de les ignorer. Au lieu de curer les canaux, reboiser nos mornes, éduquer la population, lui donner une alternative en combustible, nos pseudo dirigeants ont préféré nous avilir, nous mentir, nous emprisonner, s’enrichir, voler, piller, tuer, nous monter les uns contre les autres, diviser pour mieux régner au détriment de la collectivité. Quant aux citoyens, ils se sont laissés embarqués dans ce cercle vicieux, inexorablement suicidaire, sans assez revendiquer leurs droits fondamentaux liés au respect de la vie et de leur environnement. Malgré le danger imminent et dénoncé par la presse, de l’urbanisation accélérée et des constructions anarchiques, des centaines de milliers d’Haïtiens choisissent encore l’arbitraire plutôt que de s’organiser en comités de quartiers pouvant prendre en main leur destin et le forger avec discipline et sécurité. Ils l’ont fait consciemment, contre toute logique de survie et au détriment des futures générations qui hériteront d’un désert stérile et inutilisable qui permet à la pluie- dont paradoxalement nous avons tant besoin- de se transformer en un torrent, en ‘’lavalas’’, détruisant tout sur son passage. Dans ce cauchemar écologique, le sens même de la vie semble s’évanouir sur note île, autrefois royaume d’Agwe, le dieu vaudou des océans.


‘’L’Opération Bagdad’’ ou le moment de vérité


  Alors que Gonaïves n’avait pas encore fini de compter et de pleurer ses morts, voilà qu’une autre tempête- celle-ci, imprévisible dans son ampleur et sa terreur- s’abat sur la capitale et le Cap haïtien. L’Opération Bagdad est lancée par les partisans du dictateur déchu à l’occasion du 13ème anniversaire du coup d’Etat de 1991. Leurs violentes manifestations, préalablement annoncées, ont fait une vingtaine de morts dont 7 policiers, plusieurs retrouvés décapités. Non contents de semer la terreur, les partisans d’Aristide ont revendiqué la décapitation le 5 octobre d’un militaire démobilisé en claironnant sur les ondes que ‘’cela servira de message au Lieutenant Ravix’’. Le lendemain, c’était au tour d’un jeune civil d’être retrouvé décapité et les ‘’chimères’’ signent leurs actes en revendiquant péremptoirement qu’ils appartiennent à ‘’l’Armée sans tête’’ (AST) et qu’ils attaqueront le 7 octobre les commissariats de police si un des leurs, le dénommé ‘’Dread Mackenzie’’, n’est pas libéré. Sur les ondes de Radio Ibo, ils ont menacé de mort les citoyens, les militaires démobilisés et le Chef de Gouvernement.


 Les acrimonies et sérieuses critiques de différents secteurs de la société contre la MINUSTAH ont sans doute donné lieu à une réunion d’urgence entre les Forces des Nations Unies et le CSPN le 5 octobre dans l’après-midi. Suite à cette réunion, le lendemain,  dans le quartier de Bel Air, une importante opération menée dès l’aube par des 200 soldats de la mission onusienne et 150 policiers. Résultats: 75 personnes interpellées…mais aucune arme n’a été saisie, les têtes de gangs ayant eu le temps de déguerpir. Si certains leaders politiques ont applaudi cette opération, la population, quant à elle, restait très sceptique et exprimait sur les ondes non seulement son inquiétude mais aussi l’irresponsabilité du gouvernement qui, selon elle, a abouti aux dérapages actuels. Plusieurs personnes ont également évoqué une possible complicité de certains policiers avec les chefs de gangs ; complicité qui aurait permis à ces derniers de vider les lieux avec des armes lourdes.  Cette opération n’a pas du tout impressionné les ‘’chimères’’ qui ont poursuivi pendant presque toute la journée leurs forfaits à travers la capitale en pillant et en incendiant des magasins, détruisant des véhicules, provoquant la société entière sur les ondes et semant la panique dans les rues. Et pour cause, les lavalassiens n’ont peur de rien, ni de personne et ont démontré dans le passé, comme aujourd’hui, qu’ils n’entendent pas rentrer dans un schéma démocratique. Ils sont des criminels, se revendiquant comme tels. Ils devraient être déclarés et traités comme des ‘’hors la loi’’.  Si certaines personnalités internationales souhaitent nous imposer une solution de dialogue entre les partis politiques et les lavalassiens, il faut croire que notre réalité leur échappe : en Haïti, nous ne sommes pas en guerre avec des partis armés qui s’affrontent. La société civile est prise en otage par des bandits armés et ne peut concevoir, à juste titre, de dialoguer avec des assassins et encore moins croire qu’ils puissent – ou veuillent- être honnêtement intégrés dans un processus électoral. Dans un article de Haïti Observateur, on apprenait cette semaine que selon ‘’ les révélations faites la semaines dernière par le ministre de la Défense de l’Argentine, environ 2 000 hommes armés se préparent pour une attaque le 18 octobre prochain (…) Le journal poursuit en expliquant que, ‘’selon plusieurs sources concordantes, les lavalassiens ont réceptionné un container rempli d’armes et de munitions, dans le département du Sud, précisément à l’endroit appelé Douyon, localité située non loin de Port-Salut.   On informe que la cargaison était composée de plusieurs types de mitraillettes, y compris des Uzi, des AK-47 ainsi que des mitrailleuses 50  et 60.   Suivant les experts, ces deux dernières armes signalées rendraient  le groupe qui les détient nettement supérieur à la Police nationale. On affirme, en effet, que dans le container en question se trouvaient aussi des « >RPG-7 » et des « Stinger ».   Le RPG-7 est une grenade propulsée et lancée comme une roquette sur une distance de près d’un kilomètre. En revanche le Stinger est une roquette qui peut descendre un avion volant à basse altitude, qui décolle ou bien qui s’approche de la piste pour atterrissage. Cette même arme, dit-on, est capable de détruire des tanks légers et des véhicules de transport de troupes. Les mêmes sources qui ont fait les révélations au sujet des armes débarquées à Douyon laissent croire que l’ex-sénateur Lavalas Yvon Feuillé ne serait pas étranger à ce trafic. On avance même que le lieu où la cargaison a été réceptionnée se trouve dans une région qu’il connaît comme la paume de sa main.   On répète dans ces mêmes milieux que les armes débarquées dans cette zone provenaient de l’Afrique, particulièrement de la Rhodésie, et des anciens gardes du corps sud-africains d’Aristide seraient à l’origine de la transaction ayant abouti au transport de la marchandise vers Haïti et à son débarquement clandestinement dans une zone totalement contrôlée par des partisans du prêtre défroqué.’’(1)


Il est clair que la tolérance du Gouvernement, particulièrement sous l’influence américaine, a entraîné la réapparition sur la scène des partisans d’Aristide. Ces derniers se sont ouvertement déclarés être des terroristes et l’Opération Bagdad prouve qu’ils ne font pas uniquement du mimétisme terroriste, mais qu’ils sont prêts à aller jusqu’au bout de l’horreur, comme dans la capitale irakienne, pour appliquer leur plan macabre. Une situation des plus préoccupantes qui a porté le Ministre de la Justice, Me Bernard Gousse a déclaré lors du dernier Forum de la Amcham (Chambre de Commerce Américaine en Haïti) qu’aujourd’hui, ‘’ on assiste à des attaques qui ne sont pas du simple banditisme mais des actions concertées et planifiées. Les commerces sont pillés et les bâtiments publics sont menacés, notamment les bâtiments judiciaires. Ces menaces ne visent pas le Gouvernement en particulier mais toute la société. On attaque tout ce qui peut ressembler à la normalité sociale et ce que nous vivons aujourd’hui nous rappelle les journées noires de février dernier (…) On ne peut pas nous demander de monter sur un ring  et de nous battre contre quelqu’un qui a les mains libres et un fusil dans chaque main, alors que nous sommes dans ce ring avec une main cachée derrière le dos et l’autre désarmée. Ceci n’est pas loyal et nous ne pouvons l’accepter. Nous demandons à ceux qui sont prêts à nous taxer d’Etat criminel, de gagner en cohérence en nous aidant davantage dans cette nécessité urgente de nous armer et de nous équiper ‘’a déclaré le Ministre de la Justice, en faisant implicitement référence au dernier communiqué du Département d’Etat américain. Et pour cause ! Alors que le Gouvernement avait dénoncé l’embargo des armes contre la police nationale, les américains continuaient de mener leur politique absurde de vouloir récupérer le mouvement Lavalas sans Aristide. Un jeu dangereux qui aujourd’hui fait rouler des têtes dans les rues. Certains observateurs politiques pensent même que tous les lavalassiens devraient être écartés du prochain processus électoral car il n’existe pas de lavalassiens modérés ; seulement certains plus intelligents que d’autres, mais leurs bases sont toutes constituées de ‘’chimères’’ qui, aujourd’hui comme demain, seront lâchées comme des bêtes féroces contre les innocents. Comme l’a indiqué le leader du MDN cette semaine, Hubert Deronceray, les lavalassiens devraient être déclarés ‘’hors la loi ‘’. Ils sont inaptes à être intégrés dans un processus démocratique : ils l’ont démontré en maintes fois dans le passé et encore aujourd’hui. ‘’Ce sont des cannibales’’, a-t-il déclaré, ‘’qui doivent se faire soigner mentalement avant qu’on envisage de les considérer comme parti politique’’.  La question est de savoir si le parti Lavalas existe toujours et s’il est représentatif d’une tranche de la population ou s’il n’est composé que de gangs terroristes. Dany toussaint, qui n’a rien d’un enfant de chœur, a admit au journal Le Monde qu’ il ne fait aucun doute qu’Aristide a téléguidé les violences des derniers jours depuis son exil sud-africain. “Il est le chef de la Famille Lavalas et nous savons qu’il est toujours en contact avec les “chimères”, assure Dany Toussaint, qui dirigea la police sous la présidence d’Aristide, avant de rompre avec lui. “La Famille Lavalas a montré à nouveau que c’est un groupe terroriste qu’il faut mettre hors d’état de nuire. On ne peut accepter que des terroristes paralysent la capitale pour satisfaire l’ambition d’un homme, affirme-t-il. C’est plus difficile aujourd’hui qu’il y a six mois, car les “chimères” se sont éparpillées et se cachent maintenant dans tous les quartiers.”(2) ‘’ Face à cette recrudescence de la violence, la fièvre et la colère montent parmi la population : le responsable du Groupe des 184 organisations de la Société Civile, André Apaid Junior, a appelé à la reprise de la mobilisation pacifique pour faire échec aux secteurs qui se réclament du régime déchu contre le Gouvernement, la Police et la population. Cet appel a été suivi par le même cri des enseignants, étudiants, militaires démobilisés et par certains partis politiques.


Le moment de vérité est donc arrivé pour tous : si le Gouvernement ne réagit pas de façon extrêmement ferme, il court à sa perte et risque d’échouer dans sa mission. A force de compter sur une communauté internationale, pour laquelle Haïti n’est pas prioritaire, et des conseillers Haïtiens de la diaspora qui n’ont aucune expérience sur le terrain, le Premier ministre est en train de s’isoler, mais surtout en train d’enliser le pays dans un autre potentiel chaos, n’en déplaise au Lieutenant Général Heleno Pereira. D’autre part, si le Ministère de la Justice avait entrepris les démarches nécessaires pour des poursuites judiciaires sérieuses contre Aristide et tous ses acolytes, ces derniers auraient été forcés d’utiliser leur argent pour leur défense dans les tribunaux locaux et internationaux plutôt que de s’en servir pour financer des armes. Le Premier ministre devrait donc prendre des mesures, mêmes drastiques et tous azimuts, pour instaurer immédiatement l’autorité de l’Etat. Si la violence perdure, il serait même souhaitable qu’il rassemble les partenaires de l’Accord du 4 avril pour déclarer l’état d’urgence et obtenir la latitude nécessaire pour des opérations musclées contre les ‘’chimères’’. C’est également le test ultime pour les forces internationales qui, si elles ne protègent pas plus activement la population, se verront demander de quitter le pays, comme le réclament déjà de nombreux secteurs révoltés contre leur inaction. Il ne restera plus qu’à la population à constituer un front commun contre le retour des sauvages, mais cela peut être collectivement dangereux et faire couler beaucoup de sang vu les armes détenues par les lavalassiens. Si les élections sont compromises par la violence de ces derniers jours, elles sont encore loin. Par contre, la radicalisation de la population par rapport aux chimères est plus imminente. Nous sommes arrivés aux portes de l’enfer. Si les têtes décapitées ont été celles d’Haïtiens, rien ne dit que les prochaines ne seront pas celles d’Occidentaux…


« A l’impossible nous sommes tenus » aime répéter M.Gérard Latortue mais le Premier ministre n’avait sans doute pas mesuré la profondeur de l’impossible dans ce pays. Il devrait plutôt s’attacher à réussir le possible avant qu’il ne soit trop tard car l’impossible recule devant celui qui s’avance. Winston Churchill ne l’a-t-il pas prouvé en disant : « Agissez comme s’il était impossible d’échouer » ?


Nancy Roc, le 7 octobre 2004


1/ Karine d’Ennery Déjoie, Les lavalassiens sur pied de guerre, le 4 octobre 2004
2/ Jean Michel Caroît, L’ONU est critiqué pour son inaction face aux violences en Haïti, 5 octobre 2004


La reproduction, la redistribution ou la syndication du texte ci-dessus, dans son intégralité ou en partie, nécessitent l’autorisation préalable et expresse de l’auteur.

L’insécurité au Centre des Préoccupations du Secteur Privé Haïtien

« Nous savons que les meilleures intentions existent pour nous sortir de cette situation mais nous demandons que les moyens nous soient donnés pour que la lutte contre la criminalité ne soit pas inégale »(Bernard Gousse, Ministre de la Justice).

Originally: La démocratie engendrera le développement et non l’inverse en Haïti, selon le chef de la Mission de l’ONU

La démocratie engendrera le développement et non l’inverse en Haïti, selon le chef de la Mission de l’ONU
 
 
6 octobre ? Lors d’une entretien avec la radio en langue française de l’ONU, le chef de la Mission de l’ONU à Haïti a fait un bilan de la situation au lendemain des émeutes qui ont conduit à la mort de 9 policiers dans des conditions barbares, exprimant l’espoir que le contingent de 8 000 policiers de la Mission serait au complet d’ici la troisième semaine d’octobre et précisant que le processus de réconciliation précédait à son avis le développement économique.


« La situation en matière de sécurité est vraiment préoccupante » a déclaré Jean Gabriel Valdés, qui a précisé, lors d’un entretien avec la radio en français de l’ONU que la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) travaillait avec la police haïtienne dans les secteurs les plus difficiles de Port-au-Prince, conformément le mandat que lui a confié le Conseil de sécurité qui est d’aider la police à rétablir la paix et la sécurité dans le pays.


«Nous sommes confrontés à des groupes armés qui n’hésitent pas à utiliser des armes de guerre, qui n’hésitent pas à attaquer directement la police, à brûler des commerces et à piller » a-t-il indiqué, précisant qu’à ce sujet, il avait « eu une longue réunion de travail avec les autorités haïtiennes, le Premier ministre, le ministre de la justice » afin de travailler ensemble et de coordonner les actions respectives.


« Nous sommes une force de pacification mais en même temps notre mandat nous oblige à répondre à ces attaques et à être capables d’aider le Gouvernement», a déclaré le chef de la Mission de l’ONU, qui a souligné que « ce sont les populations les plus pauvres qui habitent dans les quartiers » touchés par la violence.


« Je crois que la réunion avec la Primature nous a donné une situation tout à fait différente », a-t-il souligné, se déclarant plus optimiste quant aux capacités mises en place.


Interrogé sur ce que faisaient jeudi dernier, jour des émeutes qui ont conduit à la mort de 9 policiers dont trois victimes de décapitation, les militaires de la MINUSTAH, qui sont autorisés, au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, à recourir à la force, le chef de la Mission a indiqué « qu’ils opéraient dans une ville de plus de deux millions d’habitants, dans la rue, dans une situation dans laquelle de petits groupes s’attaquent à des manifestants ou à des policiers ».


Au commencement « la manifestation a été pacifique », mais elle a malheureusement été prise en main par des gens qui cherchaient la confrontation, a-t-il expliqué, ajoutant que ces groupes armés pouvaient avoir une grande mobilité, « dans une ville où il est difficile de faire circuler des véhicules lourds », et que dans les quartiers les plus pauvres, il y avait eu un grand désordre.


« Nous avons assisté à des gestes d’une grande brutalité, la décapitation des policiers a été une chose atroce, que la communauté internationale a condamné de façon très nette », a déclaré le Représentant spécial.


Interrogé sur la date à laquelle seraient déployés les 8 000 militaires promis par l’ONU, 3 000 étant actuellement présents dans le pays, Juan Gabriel Valdés a précisé qu’il s’agissait d’une question très importante, la Force ne fonctionnant à l’heure actuelle qu’à 40-50% de ses possibilités.


« Il est essentiel que l’on donne une agilité plus grande au déploiement de troupes » a-t-il déclaré, ajoutant qu’il espérait la venue, au mois d’octobre, d’une Force policière chinoise et pakistanaise, ce qui permettra de mettre en place une force policière internationale.


« Du point de vue militaire, il est très important de recevoir le contingent espagnol et marocain qui doit arriver la troisième semaine d’octobre, le contingent des ingénieurs syriens et équatoriens, qui devrait être ici, et qui, j’espère, arriveront très prochainement en Haïti. On peut s’attendre à ce que, d’ici la mi-novembre, nous ayons une force beaucoup plus installée, avec un pouvoir de dissuasion beaucoup plus grand », a déclaré le chef de la MINUSTAH.


Interrogé par ailleurs sur le désarmement des groupes à la solde de bandes militaires, M. Valdés a rappelé que « le processus de désarmement et de réinsertion des bandes armées était un processus lent ».


« Ce n’est pas un processus qui peut être mené en 3 ou 4 mois ou en un an. C’est un processus que nous voyons lié aussi à des opportunités économiques, des opportunités de réinsertion économique et politique mais cela demande alors un effort concerté de la communauté internationale et des autorités haïtiennes.


« Nous avons indiqué à tous les groupes armés que nous sommes prêts à initier » un processus de désarmement volontaire, « mais nous considérons qu’il n’est pas possible de continuer à accepter qu’il y ait des groupes qui importent et qui distribuent des armes dans les secteurs populaires et qui soient prêts à les utiliser à des fins de déstabilisation » a-t-il déclaré avant d’insister à nouveau sur le fait que « la question du désarmement était un processus lent, qui va prendre des années ».


Répondant à la question de savoir si le dialogue était possible entre Haïtiens, notamment à « la suite de l’arrestation par le Gouvernement de quatre parlementaires du parti Lavalas [le parti de l’ancien président Aristide], à la sortie d’un débat radiophonique », M. Valdez a indiqué que la question du désordre national était une question essentielle.


« On ne peut pas organiser les élections si l’on n’a pas une base, un accord politique qui puisse mener les Haïtiens à la réconciliation », a-t-il précisé, ajoutant qu’« il existait une division très profonde de la société haïtienne » mais qu’il ne perdait pas l’espoir de parvenir à un dialogue constructif.


Rappelant que la réconciliation était à la base du mandat de la MINUSTAH, et qu’elle passait par le rejet des armes, M. Valdez a indiqué qu’il existait au sein de l’opposition et du Gouvernement des éléments disposés à initier un dialogue qui puisse donner à ce pays la démocratie et les libertés nécessaires à son développement.


« Nous ne pensons pas que ce soit le développement qui pousse la démocratie, c’est probablement la liberté et la participation qui peuvent donner des opportunités de développement économique. Les choses vont ensemble et nous faisons aussi un effort pour initier le dialogue politique ».

Originally: Men with guns and machetes block Port-au-Prince slum, threaten to behead foreigners

Men with guns and machetes block Port-au-Prince slum, threaten to behead foreigners
7 octobre 2004


PORT-AU-PRINCE, Haiti_Demanding the return of their ousted president, Jean-Bertrand Aristide, young men with machetes, guns and rocks set alight tires in the street and threatened to behead foreigners after U.N. troops and police arrested dozens in a sweep through a volatile slum.


Peacekeepers in armored personnel carriers moved into the Bel Air slum Wednesday while gunfire crackled and two helicopters roared overhead, trying to put down a campaign by Aristide loyalists who have carried out gory beheadings in imitation of Iraqi insurgents.


The headless body of a man lay in the street in La Salines, another slum, on Wednesday morning. Three police officers also were decapitated last week when Aristide supporters stepped up protests demanding his return from exile in South Africa and launched “Operation Baghdad.”


At least 19 people have been killed in a week of violence in Port-au-Prince, which relief workers said could paralyze attempts to feed tens of thousands of hungry survivors in the northwest port city of Gonaives after devastating floods from Tropical Storm Jeanne last month.


At least 50 people have been treated for gunshot wounds since Friday at Port-au-Prince General Hospital, records show. Officials said the hospital usually treats one or two wounded people a day.


One angry man in Bel Air on Wednesday thrust a gun into the face of an Associated Press reporter, yelled expletives against President Bush and U.N. peacekeepers, then screamed “We are going to kidnap some Americans and cut off their heads.”


Protesters also have been demanding an end to “the invasion” _ referring to U.S. Marines who flew in the day Aristide left in February and U.N. peacekeepers who replaced them in June.


Aristide loyalists blocked streets throughout Bel Air on Wednesday with torched cars and other debris, just blocks from the National Palace. U.N. troops and Haitian police surrounded the district Wednesday, searching cars and people at checkpoints while conducting arrests in the slum.


Police spokeswoman Jesse Coicou said 75 people were detained for questioning during the sweep of Bel Air, but officials said no weapons were found. U.N. spokesman Toussaint Kongo-Doudou said it appeared weapons had been hidden.


Troops and police withdrew from Bel Air later Wednesday, leaving deserted streets to men and boys armed with machetes, guns, knives, bottles and stones. They lit bonfires to block roads with torched cars, tires, mattresses and furniture.


Interim Prime Minister Gerard Latortue _ whom protesters have also threatened to behead _ accused pro-Aristide street gangs of instigating the violence. Aristide supporters say the police started it by firing at unarmed protesters.


On Tuesday, a dozen young men and children in Bel Air shot a man and tried unsuccessfully to hack off his head, accusing him of spying for rebels who overthrew Aristide, said Ninger Napoleon, a reporter for Radio Antilles who watched the scene.


Rebel commander Ravix Remissainthe told Radio Metropole the man was a former soldier.


Aid workers said the violence threatened to handicap flood relief efforts in northwestern Haiti. Anne Poulsen of the U.N. World Food Program said the unrest had scared away workers from the capital’s port, where 135 containers with 2,430 tons of food were stuck.


As the port remained closed, Poulsen said the World Food Program had asked U.N. troops to provide security “so we don’t break the pipeline of aid going into Gonaives.”


Some 750 of the 3,000 U.N. peacekeepers in Haiti are tied up protecting relief supplies and trying to keep order at food distributions in Gonaives.


At least 1,870 were killed by Tropical Storm Jeanne, which drenched northwestern Haiti for 30 hours beginning Sept. 17. Some 884 people reported missing, most presumed dead.


In Gonaives, food aid has failed to reach thousands who are too weak, sick or old to get into rowdy food lines. More than 100,000 remain hungry, the International Federation of Red Crescent and Red Cross Societies said.


Gonaives had never recovered from the February rebellion that began when a street gang torched government buildings, released jailed criminals and forced police to flee. Dozens of people were killed.