Originally: Andy Apaid, un des leaders de l’opposition au président haïtien:«Le chaos c’est maintenant, pas après le départ d’Aristide»

 


Andy Apaid, homme d’affaires de 52 ans, est le coordinateur du Groupe des 184, qui rassemble syndicats, organisations socioprofessionnelles, associations… Il représente la société civile haïtienne en lutte contre les dérives du pouvoir d’Aristide sur les droits de l’homme. Le Groupe des 184 et la Convergence démocratique (une vingtaine de partis d’opposition) se sont rejoints il y a deux mois pour réclamer d’une seule voix la démission d’Aristide. Le mouvement insurrectionnel qui frappe depuis jeudi le pays n’a pas été lancé par cette opposition mais par des gangs rebelles issus des quartiers populaires qui, pour certains, avaient longtemps travaillé au service du pouvoir pour réprimer l’opposition.


Quelle est votre position face à ce mouvement ?


Nous sommes face à une situation presque insurrectionnelle qui s’aggrave. Un mouvement qui n’est pas coordonné. Il y a différents groupes qui effectivement sont en train de prendre en main l’appareil policier dans chacune de leurs villes ­ et la police abandonne les postes. Ils ne sont qu’une partie émergée de l’iceberg, contre des groupes violents et armés, une machine criminelle occulte qui réprime le peuple haïtien depuis longtemps. Nous, nous tenons à ce que notre mouvement, pacifique, reste la référence politique pour aider notre pays à sortir de cette situation… Nous en appelons à la communauté internationale : qu’elle se rende compte qu’on ne peut pas continuer à compter sur monsieur Aristide pour rétablir la situation et qu’elle aide ce pays à prendre la voie de la démocratie. Plus on attend, plus la situation va s’aggraver.


Comment réagit la police sur le terrain ?


Elle abandonne les commissariats et ne veut plus recevoir d’ordres du pouvoir, qui ne pensait qu’à la répression contre la population. Si nous avons un risque d’insurrection générale, c’est parce que même la police n’a plus confiance dans les institutions.


Avez-vous des contacts avec les groupes et gangs armés qui mènent cette rébellion ?


Nous avons des contacts avec des membres de la société civile des villes qui ont été prises. Quant à ces gangs, il nous est arrivé de leur donner notre opinion : nous sommes pour la conversion de ces fils égarés. Nous les invitons à changer de comportement. Le drame, c’est la répression. Et, du coup, une partie de la population se retrouve partiellement dans la rébellion actuelle.


Comment a réagi le président Aristide ?


En affirmant que certains préparent un coup d’Etat et qu’il n’a aucune responsabilité dans ce qui se passe. Mais si, c’est lui qui est à la tête de l’Etat !


Vous dialoguez encore avec le pouvoir ?


Plus encore depuis les événements du 5 décembre (une violente manifestation estudiantine très durement déprimée, ndlr), nous affirmons qu’il ne peut plus faire partie de la solution. Il est un obstacle à ce pays. Le chaos c’est maintenant, le chaos n’est pas pour après le départ d’Aristide. Plus il s’accroche, plus il va devoir commettre des crimes pour se maintenir au pouvoir jusqu’à ses derniers jours.


Vous réclamez l’intervention de la communauté internationale, concrètement, qu’est-ce que cela veut dire ?


L’OEA (Organisation des Etats américains) a différents mécanismes pour isoler diplomatiquement les gouvernements qui cassent la démocratie. Et la Communauté des Caraïbes (Caricom) a évoqué des mesures de «sanctions ciblées».