Originally: Compensation


Les rodomontades d’Aristide, prêtre défroqué devenu tyran richissime, dont les nervis, baptisés «chimères», terrorisent la population de son île-bidonville, sont à la fois dérisoires et exemplaires. Son ultimatum à la France, qu’il somme de «restituer» à Haïti le trésor (21 milliards de dollars) qu’elle lui aurait volé, est à mettre au compte des dérives d’un despote qu’intoxique la phraséologie populiste et xénophobe dont il se sert pour aveugler son peuple.


Après deux siècles d’indépendance, Haïti, «l’île qui valait un empire», a été transformée en «coeur des ténèbres» caraïbes. L’espoir de la voir entrer dans la modernité et le développement qu’avait suscité l’élection du même Aristide a vite sombré dans un délire mégalomaniaque nourri de violences et de corruption, qui n’a plus grand-chose à envier à la sinistre ère Duvalier ­ sinon que le vaudou y a été mâtiné d’un ersatz frelaté de théologie de la libération. Comme si la première république noire de l’Histoire n’avait d’autre constante politique qu’un despotisme prétendument investi de pouvoirs occultes ou mystiques…


Fatalité ou legs de l’histoire ? Aucune puissance occulte ni hostilité du reste du monde n’expliquent qu’Haïti soit un Etat en faillite permanente. Mais le fait est qu’il a été fondé sur les débris de l’esclavage ­ tragédie dont les ravages déforment et handicapent les hommes bien plus profondément et durablement qu’on ne le pense.


S’il ne saurait y avoir «restitution» ni «compensation» de l’esclavage, la France garde une obligation morale de ne pas se détourner du peuple de son ancienne colonie et terre d’esclavage. En dépit des chimères de celui qui la dirige. Et pour soutenir ceux qui les combattent.