Originally: Des enfants chez les partisans armés d?Aristide
Port-au-Prince – Les partisans armés du président haïtien Jean Bertrand Aristide, contesté de plus en plus par des étudiants, ont montré vendredi un visage menaçant, intégrant pour la première fois des enfants dans leurs rangs.
Selon de nombreux témoins cités par les radios haïtiennes, des gamins de 12 ou 13 ans en armes ont été vus dans plusieurs quartiers de la capitale aux côtés des partisans du chef d?État, issus des bidonvilles et utilisés par le parti Lavalas au pouvoir comme troupes de choc pour contrer l?opposition.
Ces éléments armés, dont le cri de ralliement était “Aristide pour cinq ans”, ont sillonné les rues à bord de véhicules banalisés, rançonnant les automobilistes et s?emparant souvent manu militari de leurs véhicules.
L?apparition de ces enfants armés, dont l?utilisation est monnaie courante en Afrique mais inconnue jusqu?à présent en Haïti, a inquiété une grande partie de la population.
Jouant l?apaisement, le premier ministre haïtien Yvon Neptune a tenté dans la soirée de rassurer les habitants de la capitale en affirmant que “personne ne doit remplacer la police”.
L?intervention d?un député du nord du pays, Nahum Marcellus, considéré comme l?un des tenants de l?aile dure du parti Lavalas, avait au préalable au contraire appelé à la lutte armée contre ceux qui veulent le départ du chef de l?État.
“Jean Bertrand Aristide ne fera pas un pas, sortez vos armes, nous sommes engagés dans une bataille”, a-t-il dit en langue créole sur les ondes de sa station de radio, Radio Africa, qui émet dans le nord
d?Haïti. Il a dénoncé la crise actuelle comme “un complot bourgeois contre les malheureux”.
L?Organisation des États Américains, qui a engagé une réflexion sur la suite de sa mission en Haïti, a réclamé à de nombreuses reprises le désarmement des bandes armées proches du pouvoir, préalable à la tenue d?élections.
La crise en Haïti, le pays le plus pauvre du continent américain, a véritablement pris un tournant explosif il y a une semaine avec l?agression, par des partisans armés du pouvoir, d?étudiants et de responsables universitaires sur deux campus de la capitale. Les violences ont fait 25 blessés par balles, jets de pierres et coups de bâton ou de barres de fer.
Elles ont été unanimement condamnées en Haïti et par la communauté internationale. Le gouvernement haïtien, par la voix du
président Aristide, avait notamment dénoncé l?infiltration “de faux étudiants armés” dans les universités, venus provoquer les violences.
Depuis cette agression, la détermination des étudiants, appuyés par des membres de la société civile, dont André Apaid, dirigeant du Groupe des 184, est allée croissante. Sur la défensive, le gouvernement, dont un membre a démissionné- la ministre de l?Éducation Marie Carmel Austin-, a laissé les manifestations se dérouler mercredi et jeudi, avant les tensions de vendredi.
Dans la soirée, celles-ci sont retombées et André Apaid a annoncé une concertation avec les étudiants sur la suite de leur mouvement.
Après avoir pris ses distances avec le chef de l?État, le député Prince Sonson Pierre, tenant de l?aile réformiste du parti Lavalas, a appelé vendredi le président Aristide à “sortir grandi de la crise en démissionnant”. “Président Aristide, sortez bien” de la crise, “n?en sortez pas d?une manière laide”, a-t-il dit.