L?ex-président Manigat aux assises de l?ODCA à Caracas

L?ODCA réitère son appui solidaire au RDNP et à son leader politique


 


Il vient de se tenir à  Caracas, à l?hôtel Radisson Plaza Euro-building,  deux conférences internationales successives de l?Organisation de la Démocratie Chrétienne dans les Amériques (ODCA). La première,  qui a correspondu à « La Deuxième Réunion au Sommet des « Leaders » et Chefs de partis démocrates-chrétiens », a eu pour sujet : « Les grands Défis actuels de la Démocratie dans notre continent » et la seconde, correspondant au !7ème Congrès ordinaire de l?ODCA, a eu pour thème : « Le bilan  des activités de l?ODCA pour la période 2000-2003 et le programme pour la nouvelle période 2003-2006 ».


                Le Rassemblement des Démocrates Nationaux Progressistes d?Haiti (RDNP) a été représenté à ces deux congrès et conférence par son Secrétaire Général et Leader politique le professeur Leslie F. Manigat. La présence de vétérans expérimentés de la génération des aînés avec les ex-présidents Eduardo Frey (Chili),  Luis Herrera Campins (Venezuela), Vinicio Cerezo (Guatemala),  Leslie F. Manigat (Haiti), associée à la génération moyenne avec des  ex et futurs candidats présidentiels comme Lourdes Flores (Pérou) et Eduardo Fernandez (Venezuela) s?est conjuguée avec la nouvelle génération en pleine émergence des 30-40 pour constituer la chaîne de solidarité intergénérationnelle indispensable à la construction d?un monde meilleur toujours possible sous le signe du développement durable, de la justice sociale et de la démocratie responsable. L?ex-président Manigat a surtout relevé avec plaisir les interventions très proches de l?idéal de pensée du RDNP, faites par l?ex-président Frey qu?il a qualifiées de superbes et par Lourdes Flores, forte personnalité féminine brillante de l?ODCA et étoile montante de son pays. Mais c?est sans doute avec les thèses et positions de ses anciens amis vénézuéliens, retrouvés avec effusion,  que l?ancien professeur haitien à l?Université Simon Bolivar s?est senti le plus d?affinités dans ce débat sur les défis de la démocratie continentale. La problématique vénézuélienne ressemble, en effet, comme deux gouttes d?eau avec la problématique haitienne, le pétrole excepté. L?ancien mandataire haitien s?est exprimé notamment dans une déclaration écrite.  « Notre parti le RDNP, y est-t-il dit,  n?a cessé de répéter que l?heure est arrivée de « faire la politique autrement » en Haiti, sans quoi le pays s?enlisera plus profondément encore dans cette catastrophe actuelle qui végète. Il peut se révéler inapproprié de se confiner à se prévaloir du rapport de forces avec un pouvoir qui a déjà sombré dans l?impopularité.  Mais la configuration des forces n?a pas encore changé pour autant. Car non seulement le tempérament d?un homme reconnu caractériellement autoritaire, mais aussi la nature de son régime le rend coriace et rétif à toute tentation de s?en aller par lui-même pour faciliter les choses au pays. La tragique impuissance de ceux qui ont dominé la scène politique après le renversement de notre brève expérience de gouvernement d?inspiration social-chrétienne en 1988, les a conduits depuis lors à se fourvoyer dans un populisme qui leur permette d?essayer, vainement, de cacher leur incapacité à affronter positivement et à résoudre la crise. C?est ainsi qu?après l?échec du fascisme de sous-développement de François Duvalier, le remède est devenu pire que le mal avec la substitution à son populisme de droite, de l?actuel anarcopopulisme de gauche. Aujourd?hui la coupe est pleine. Les hommes encore en place arrivent à faire fonctionner un régime de type maffieux, à base de corruption et d?assassinats en toute impunité, qui tient captif tout un peuple dans les griffes d?une misère atroce, dans les affres d?une oppression politique devenue dictatoriale, avec le spectacle quotidien des violations des droits humains, et du déni de l?état de droit, pendant que le trafic de drogue fait la richesse d?une poignée de « mauvais mutants » bien placés dans les sphères du pouvoir, au su de la DEA américaine. Déçu, mécontent, de plus en plus incapable de contenir sa colère pour exiger un changement profond et rapide de la vie du peuple haitien, la majorité s?est rendu compte qu?il n?y a plus de salut possible ni sortie de crise qui vaille tant que le pouvoir actuel reste en place. Aujourd?hui, tout le monde a les yeux dessillés, y compris des milieux hier encore aveuglément lavalassiens et qu?il nous faut récupérer pour la cause démocratique, si bien que notre seule faute fut d?avoir eu raison trop tôt. Mais nous voici de nouveau, comme toujours, indéfectiblement dans la lutte démocratique non-violente pour changer la vie du malheureux peuple haitien souffrant, particulièrement dans cette conjoncture du bicentenaire de notre indépendance nationale dont notre révolution est restée unique dans les annales de l?humanité et à jamais glorieuse comme forgeuse généreuse de la solidarité interaméricaine. Bien des peuples de cet hémisphère et d?ailleurs nous doivent un renvoi d?ascenseur dans le sens d?une coopération renforcée. C?est d?autant plus poignant que cet anniversaire se passe dans le malheur haitien d?un régime avec lequel on ne peut pactiser sans se prêter à une récupération politique indécente, comme cela vient d?être le cas avec Toussaint Louverture.


Mais un aspect de la tragédie du jeu politique actuel réside dans la désynchronisation entre le rythme et l?ardeur de la protestation de la population en voie d?une mobilisation difficile mais sans cesse méritoirement résurgente pour obtenir la fin d?une situation indéfendable et intenable,  et la tactique dilatoire paradoxalement assortie d?une habile fuite en avant électorale non seulement d?un pouvoir politique usurpé et délinquant, mais aussi des tergiversations intéressées des dirigeants d?une OEA qui se sont discrédités et même ridiculisés en 25 navettes de négociations (shuttle diplomacy) entre Washington et Port-au-Prince et en  6 notifications d?ultimatums  à Aristide d?autant plus restés sans suite que la ligne officielle  publique de l?OEA est le maintien d?Aristide à la présidence de la République  jusqu?à la fin de son « mandat » moyennant des concessions pour un partage de pouvoir illusoire et introuvable avec d?éventuels renégats de l?opposition dite démocratique toujours disponibles sur le marché de la politique haitienne.


Pour nous du RDNP, l?alternative souhaitable et souhaitée après le départ de l?équipe actuelle ? départ négocié s?il le faut, sous pression nationale et internationale pour éviter le pire -, est l?aménagement d?une période de transition durable, de l?ordre de 3 ans, pour remettre de l?ordre dans la maison, mettre la main à la tâche d?assainissement national en nettoyant les écuries d?Augias, reconstituer une force nationale d?ordre public et de sécurité nationale, relancer les investissements en rétablissant la confiance pour la récupération économique, amorcer un programme de remise sur rail du processus de démocratisation et de modernisation qui donne des espoirs aux aspirations légitimes du peuple tout entier, en vue de préparer sérieusement les élections générales et les réaliser avec toutes les garanties nécessaires, à la fin de la dite période de transition. Je viens d?avoir la surprise à Caracas que des amis vénézuéliens m?ont dit escomptent cette même durée de 3 ans pour leur récupération démocratique après un éventuel changement de régime. Pour tout cela, le préalable est la relève indispensable de la garde lavalassienne actuelle pour pouvoir faire du neuf.


La problématique haitienne rejoint ainsi les cas récents ou actuels de situations qui deviennent intenables (du point de vue de la raison, du droit, de la morale et même de l?opportunité politique) et qui obligent à considérer la fin abrupte mais bienvenue voire nécessaire de mandats présidentiels illégitimes ou devenus tels sous la pression majoritaire des peuples en vue du rétablissement  de l? institutionnalité et de l?ordre démocratiques. Il y a des prescriptions pro-démocratie en ce sens et à cette fin, comme « l?exception jeffersonnienne » bien connue et le récent pacte démocratique des Amériques. C?est un des aspects des défis de la démocratie en Amérique. Mieux ; il y a maintenant une jurisprudence politique en quelque sorte avec les antécédents récents des cas concrets du Pérou, de l?Argentine et de Bolivie qui servent de précédents d?interruption de mandats en cours,  au nom de la volonté démocratique des peuples. Ce sont là des précédents d?un problème qu?on ne peut plus ni ignorer ni élucider dans la conscience et à l?agenda du continent.


                En marge de ces deux réunions de l?ODCA, il s?est tenu la rencontre statutaire de la zone caraïbe en véritable plénière sub-régionale avec la participation des représentants des partis démocrates-chrétiens de Cuba, d?Haiti, de la République dominicaine, d?Aruba, de Curaçao, de Bonaire et de Surinam. La relance des liens de solidarité inter-insulaire s?est réalisée dans l?enthousiasme des parlers espagnol, français, anglais, hollandais, créole et papiamento.  Il est enfin à signaler comme significative la réunion spéciale aménagée entre les dits partis caraïbéens avec les membres de la  Coordonadora Democratica de Venezuela, sur demande de celle-ci, dans le cadre des « relations spéciales » avec la patrie de Simon Bolivar.


                A l?heure des résolutions particulières concernant la sub-région, outre un projet politique majeur et prioritaire avec la démocratie chrétienne cubaine, le président de l?ODCA Gutenberg Martinez, unanimement réélu,  a annoncé la  décision de développer un programme spécial avec Haiti dans les conditions particulières impétrantes  et de réitérer l?appui solidaire de l?organisation démocrate chrétienne régionale vis-à-vis du RDNP parti resté conséquent dans sa ligne stratégique, fidèle dans ses objectifs, et dans son renouveau de dynamisme organisationnel en cours, et à l?égard du peuple haitien tout entier dans sa lutte courageuse et persévérante pour la démocratisation et la modernisation par un changement politique profond, nécessaire  et urgent. Malgré la densité des travaux de ce week-end du 25 octobre, l?ex-président Manigat a trouvé le temps de contacts et échanges fructueux avec diverses délégations qui partagent avec lui et son parti les préoccupations et inquiétudes mais aussi les espoirs et les perspectives de ce changement profond, nécessaire, et urgent de la situation haitienne actuelle hélas reconnue comme la pire de l?hémisphère, changement dont il s?est fait le croisé progressiste aux assises de la démocratie chrétienne continentale à Caracas. Le père Teilhard de Chardin, paléontologue, philosophe et visionnaire, tournant le dos à la vogue violente et apocalyptique de notre temps, a écrit ce mot d?optimisme volontariste à méditer : «  Rien, d?un point de vue économique, ne nous empêche de continuer à penser que, pour l?Homme, « la vie commence demain ».